Entreprises | | 22/01
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À Aubervilliers, Le Pavé révolutionne l’industrie du recyclage

À Aubervilliers, Le Pavé révolutionne l’industrie du recyclage © CH

Bouteilles d’eau, de shampoing ou portes de frigo… Dans son usine située à l’ombre de l’A86, à Aubervilliers, l’usine Le Pavé redonne vie à ces déchets en les transformant en panneaux de plastique recyclé et totalement recyclable. Les applications sont multiples, du mobilier aux lattes de parquet.

Parti d’un projet étudiant, conçu à l’école d’architecture de Versailles par quatre élèves, Le Pavé (aussi connu sous la dénomination SAS Minimum) a été créé en 2018 par Marius Hamelot, rejoint dans l’aventure par un ami d’enfance, Jim Pasquet. Fin 2022, la startup du recyclage a levé 4 millions d’euros. Parmi ses premières réussites : elle a fourni les quelque 11 000 sièges, aujourd’hui tous livrés, du Centre aquatique olympique (CAO) à Saint-Denis, et de l’Arena Porte de La Chapelle (Paris 18ème arrdt), deux équipements phares construits pour les Jeux olympiques de Paris 2024. Les sièges sont produits à partir de billes de plastique recyclé.

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Le Pavé produit des plaque de plastique à partir de PEHD ou de polystirène recyclé.

Des plaques de plastique pour le BTP

Avant d’arriver à Aubervilliers en 2021, la petite entreprise a fait une dizaine de déménagements entre Paris et la Seine-Saint-Denis, puis s’installe à Pantin, à côté de la cité Fertile. Depuis, l’équipe s’est étoffée avec une équipe d’ingénieurs spécialisés dans le recyclage et compte au total 31 salariés.

Tout le challenge du Pavé a été réaliser un matériau 100% recyclé et 100% recyclable. Aujourd’hui, l’entreprise compte plus de 1 000 clients, du fabricant d’étagère à des architectes, en passant par de grands donneurs d’ordre du type de la Métropole du Grand Paris, le maître d’ouvrage du CAO.

Lire : Centre aquatique olympique de Saint-Denis : au-delà de la prouesse architecturale, l’enjeu écologique

Notre métier consiste à identifier un gisement de déchets et lui trouver un usage dans le secteur du bâtiment“, résume Lucas Philipponneau, le “chief of staff” de la société. Mais au départ, il n’était pas prévu de créer une usine. “On est allé voir une centaine d’industriels. Personne ne voulait intégrer 100% de matière recyclée. On s’est donc demandé comment on allait le faire nous-même ?“, explique-t-il.

Le Pavé ne gère pas la collecte de matière et ne la prépare pas. La société produit des plaques de plastique qui seront ensuite vendues pour être transformées. Leur atout : elles peuvent être poncées ou percées comme le bois et remodeler comme le plastique. Celles-ci mesurent 1,40 mètre de long par 0,90 de large. L’usine d’Aubervilliers peut traiter jusqu’à 400 tonnes de plastique par an. Elle utilise pour cela deux types de résines : le PEHD, qui sert, par exemple, à fabriquer des bouteilles de shampoing et le polystyrène issu d’anciennes portes de frigo. Une trentaine de fournisseurs, dont, par exemple, Veolia ou Paprec, lui fournissent cette matière première sous forme de broyat ou de granulés.

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L’usine d’Aubervilliers peut produire 400 tonnes de plastique recyclé par an.

Un nouveau processus industriel du recyclage de plastique

Pour y parvenir, l’entreprise a investi pour mettre au point “un process qui n’existait nulle part ailleurs“, indique Lucas Philipponneau. “La plupart des machines, d’un rose clinquant, ont été pensées de A à Z par nos ingénieurs et conçues par des fabricants français“, poursuit-il. “Pour faire simple, on a revisité le procédé de thermo-compression qui avait disparu, au profit de l’injection“, décrit-il.

Autre savoir-faire développé par la société : la gestion de son approvisionnement en matière recyclée. “Quand on doit fabriquer 11 000 sièges, il faut que du 1ᵉʳ au 11 000ᵉ, la matière soit la même. Or, on est très loin de la logique d’acquisition d’une matière vierge. Pour les commandes liées aux JO, on avait aussi la contrainte de garantir une traçabilité de son origine, dans un rayon à l’échelle de l’Ile-de-France“, souligne Lucas Philipponneau.

La chance du Pavé a été d’émerger à un moment où l’économie circulaire s’est imposée comme un vecteur stratégique de la transition écologique. “On a très vite eu des aides de l’Ademe [ndlr, Agence de l’environnement et de maitrise de l’énergie], puis de la région Ile-de-France“, pointe Lucas Philipponneau. L’entreprise a aussi bénéficié de l’effet JO, d’autant que le comité d’organisation, Paris 2024, mise beaucoup sur la production locale. “Pour une startup, se dire qu’un projet va vous suivre jusqu’en 2024, c’était une opportunité en termes de crédibilité“.

1 bouteille sur 10 est recyclée en France

Aujourd’hui, la société continue d’investir près de 70 % de son chiffre d’affaires en recherche et développement. Objectif : d’une part, dupliquer le modèle industriel ailleurs en France, comme à Allériot (Saône-et-Loire) où elle a ouvert une autre usine d’une capacité de production de 1000 tonnes ; d’autre part, diversifier les matériaux. “Moquette, chaussure, mobilier de jardin, boite alimentaire de type brique de lait… On en teste des dizaines par mois. L’idée est de compléter les caractéristiques de nos deux premiers matériaux pour proposer des produits plus performants“, précise Lucas Philiponneau.

Le Pavé cherche à élargir son offre aux entreprises du BTP. “On vient de lancer une gamme de parquets pour les sols. Mais il y a des solutions à trouver pour les revêtements de façade ou l’isolation. Le plastique est partout. Nous voulons que 100% du plastique soit collecté et recyclé. Le jour où il n’y aura plus de plastique recyclé, on sera très contents. D’où l’idée d’aller chercher d’autres gisements. Mais on en est très loin. Aujourd’hui, il n’y a que 3 bouteilles sur 10 qui sont collectées et 1 sur 10 qui est recyclée en France. Il est moins cher de faire venir du plastique vierge de Chine plutôt que d’utiliser de la matière recyclée en France. Il y a donc un vrai problème !”

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