Remplacer les caisses et palettes en bois par du solide carton, aussi robuste mais plus léger et écolo, tel est le défi qu’a relevé Sofrapack. Depuis le port de Bonneuil-sur-Marne, la PMI s’attelle désormais à remplacer le papier bulle-kraft pour éviter le plastique. Retour sur cette aventure entrepreneuriale écologique et locale avec Guillaume Rochman, son fondateur et dirigeant.
Pour l’entrepreneur, l’aventure a commencé en 2005. Alors qu’il est à peine diplômé de son école de commerce, l’École supérieure de gestion (ESG), un cousin d’Amérique évoque le concept. “Jamais je ne mettrai une machine de 500 kg qui vaut 2 000 euros dans une caisse en carton”, réagit-il. “Viens-voir”, enjoint le cousin. Revenu des États-Unis “des idées plein la tête”, Guillaume Rochman est convaincu par la robustesse du concept, et sa dimension innovante. “Cela n’existait pas.” Trois fois moins lourd que du bois, ce qui réduit les coûts de transport et l’empreinte carbone d’autant, le carton est aussi plus facilement recyclable. Il n’est pas soumis, par exemple, à la norme NIMP 15, qui impose un traitement pour réduire la dissémination d’organismes nuisibles lors des transports d’emballage.
Autre avantage, le procédé s’adapte à des dimensions spécifiques. Un crédo marketing à exploiter. C’est décidé, Guillaume Rochman se lance, à Fontenay-sous-Bois.
Dans un premier temps, il fait tout le travail seul, de la découpe au pliage, le temps de se faire un nom dans le monde du déménagement international, très demandeur de caisses pour le transport de meubles, piano, miroirs, marbre… “des choses qui sont chères, spécifiques en dimension, et fragiles“, résume l’entrepreneur.
Cet article s’inscrit dans le cadre d’une série de portraits d’entreprise ambassadeurs du Fabriqué en Val-de-Marne réalisés avec le soutien de la Chambre de commerce et d’industrie, à l’initiative de ce programme. Plus d’informations
Première réplique à Chennevières-sur-Marne
Concernant le sourcing des matériaux, il est 100% made in France. Le carton est fabriqué à moins de 100 km, dans l’Oise. Le contreplaqué qui vient renforcer les caisses les plus longues vient aussi de l’hexagone. “Même la colle est française.”
Progressivement, Sofrapack commence à recruter : un agent de production, puis deux. De quoi laisser le temps de développer le commercial. L’entrepreneur emploie aussi des alternants en apprentissage et se prépare à déménager. “À Val-de-Fontenay, nous étions dans une zone semi-industrielle, semi-pavillonnaire, et cela devenait compliqué pour les semi-remorques”, explique Guillaume Rochman.
L’emplacement, stratégique du point de vue logistique
Pour l’entreprise, l’intérêt du port de Bonneuil est d’abord la facilité d’accès pour les gros camions. La PMI n’utilise en revanche pas le rail et n’a pour l’instant que peu expérimenté le fluvial. “Il y a deux ans, nous avons expérimenté le fluvial pour importer des rouleaux, le temps de tester le marché avant de produire nous-mêmes. Ils arrivaient du Havre et transitaient par Gennevilliers, mais la difficulté était de trouver des barges pour faire Gennevilliers – Bonneuil. Aujourd’hui, cela pourrait être intéressant pour exporter, mais la difficulté est le coût. Car, pour que ce soit intéressant, il faut pouvoir remplir un container”, développe le chef d’entreprise.
Au-delà de l’aspect logistique, la majorité des employés habitent désormais à proximité, deux salariés résident même à Bonneuil. Les clients, aussi, sont proches de Paris.
Ressources humaines : un tremplin nécessaire, mais semé d’embûches
Bien installée, la jeune entreprise peine en revanche à embaucher de nouveaux agents de production, dans ses premières années. Le profil ? Des BTS électromécaniciens, “manuels et réfléchis” formés ensuite en interne. “La question des ressources humaines a été un véritable obstacle à mon développement, pendant de longues années”, confie Guillaume Rochman. Même si le hasard fait parfois bien les choses. Une personne qui cherchait du boulot est ainsi venue directement frapper à la porte. “Aujourd’hui, c’est notre manager de proximité, c’est qui gère l’équipe !” Pour sortir de ses difficultés à embaucher, l’entrepreneur s’est appuyé sur le réseau local pour recruter, notamment sur les missions locales et Pôle Emploi. “Ils font un petit tri et présentent des candidatures plus sérieuses.”
Après les caisses et les palettes, les rouleaux qui remplacent le bulle-kraft
Pour Sofrapack, le plan de relance après la crise sanitaire constitue un tournant décisif pour financer une diversification importante de son activité, le lancement d’un rouleau d’emballage de protection 100% papier, alternatif au papier bulle-kraft qui repose sur le plastique. Le nouveau produit, baptisé Pleatwrap, est constitué de papier plissé 100% recyclé et recyclable, normé ISO. Mais, lancer une nouvelle chaine de production représente un investissement initial que la PMI ne peut couvrir.
Des subventions du plan de relance pour financer la diversification
Alors que le plan de relance est annoncé, l’entrepreneur décide de tenter sa chance, sans trop savoir à quelle porte frapper. “Nous produisons en France, notre projet est écologique, nous exportons à plus de 50%… J’avais la conviction qu’on cochait pas mal de cases, mais je ne savais pas vers qui me tourner. Alors, j’ai écrit au ministre de l’Industrie. Deux mois plus tard, j’ai été rappelé par son cabinet et ai été reçu à Bercy”, se souvient-il. Un coup d’accélérateur pour l’entrepreneur qui reçoit des recommandations pour postuler à tel ou tel dispositif. Le résultat : une subvention de l’État via BPI France, dans le cadre du soutien industriel aux territoires, et une subvention de la région, TP’Up Relance, sur des dépenses complémentaires. “Au total, les subventions se sont montées à 400 000 euros pour un investissement du double.” Un beau coup de pouce pour lancer la diversification.
Un tournant aussi côté RH, avec le recrutement de plusieurs personnes tant sur le plan commercial et d’administration des ventes que sur celui de la production. Aujourd’hui, Sofrapack emploie 9 personnes dont 5 agents de production en CDI, contre 3 personnes il y a seulement deux ans. Le chiffre d’affaires a suivi, passé de 906 000 euros en 2022 à 1,2 million d’euros en 2023, soit une progression de plus de 32% des recettes.
La force du réseau
Entre temps, l’entreprise a appris à ne plus être isolée. “J’ai été accompagné par la BPI (Banque publique d’investissement), la Team France export, par un ambassadeur de la French Fab. Une experte industrie de la CCI (NDLR, Chambre de commerce et d’industrie) m’a accompagné de bout en bout, pour préparer tous les dossiers, et même pour mettre en place un ERP (NDLR, logiciel qui organise les processus dans l’entreprise). En bref, à faire les choses correctement, dans l’ordre.”
Le réseau, le chef d’entreprise en a toujours été convaincu, est indispensable pour avancer. Encore faut-il développer le bon. “J’ai aussi été au BNI (réseau entrepreneurial destiné à développer le business de ses membres) pendant six ans, à Paris Bastille. Cela m’a beaucoup formé pour faire des pitchs, mais c’était un peu trop orienté services. Nous cherchons davantage à développer notre réseau dans l’industrie.”
Aujourd’hui, Guillaume Rochman est lui-même devenu conseiller du commerce extérieur, une manière de rendre les conseils utiles qu’il a reçus. Il fait par ailleurs partie des premiers ambassadeurs du Fabriqué en Val-de-Marne, propulsé par la CCI 94.
Prochain challenge : la diversification des clients, au-delà des déménageurs
Après cette diversification produits, la PMI, qui transforme environ 36 tonnes de carton chaque année, à 65% pour une clientèle de déménageurs internationaux, souhaite désormais élargir ses débouchés en développant la clientèle d’entreprises qui exportent, notamment des produits de grande taille, fragiles, spécifiques. Un nouveau challenge, qui passe d’abord par le commercial.
Sofrapack en bref
Date de création : 2005
Président-fondateur : Guillaume Rochman
Localisation : port de Bonneuil-sur-Marne
Activité : Production de palettes et caisses en carton, rouleau d’emballage de protection en papier recyclé
Chiffre d’affaires 2023 : 1,2 million d’euros
Effectif : 9 personnes
Site internet
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L’idée est intéressante, mais il ne faut pas oublier que les palettes en bois sont réutilisables, et que stocker d’une manière ou d’une autre (palette, charpente, meuble) du bois qui a terminé sa croissance emprisonne le CO² stocké perdant la croissance de l’arbre, alors que le carton, même recyclé, nécessite un fort traitement industriel …
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