Élections | | 22/06
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À Gagny, des électeurs déboussolés par les élections législatives anticipées

À Gagny, des électeurs déboussolés par les élections législatives anticipées © CH

Dans la 8ème circonscription de Seine-Saint-Denis, le Rassemblement national a fait mieux que La France insoumise, en arrivant en tête dans deux de ses trois communes, dont Gagny. En 2022, c’est pourtant la candidate Nupes-PS, Fatiha Keloua Hachi, qui a été élue face à la députée sortante macroniste Sylvie Charrière. À quelques jours du premier tour, le 30 juin c’est l’inquiétude et l’incertitude qui prédomine chez les habitants.

Gagny, sa station de RER, sa place, son église, son taxi de la Marne exposée place Foch sous un écrin de verre… “Ne me parlez politique ! Ce qui se passe est désastreux. Je n’y comprends plus rien. On dirait que toutes les étoiles sont alignées pour casser la machine“, lance un quadragénaire qui traverse à grandes enjambées la place Foch. “Franchement, ça vous étonne vous que le RN soit arrivé en tête ! On dit que c’est un parti raciste. Peut-être qu’il y en a [des raciste]. Mais il y a aussi beaucoup de gens qui attendent du concret, qui en ont marre d’être déçus“, lâche Alain.

Dans la commune d’un peu plus de 40 000 habitants, située à l’est de la Seine-Saint-Denis, à la lisière de la Seine-et-Marne, le RN a devancé LFI de 25 voix. Même scénario dans la ville voisine, Villemomble (22,40%). Des marges d’avance modestes, mais en comptant les voix de Reconquête !, l’extrême-droite s’y est positionnée largement devant LFI, la liste Renaissance, et surtout la droite traditionnelle dont sont issus les maires des trois communes. Il n’y a guère qu’à Rosny-sous-Bois que LFI est restée en tête.

Ce qui me frappe, c’est qu’on mette sur le même plan le RN et le Front populaire

Les résultats des élections européennes donnent encore des sueurs froides à certains. “Je ne sais pas trop pour qui voter. Il y a une telle pression avec l’extrême-droite, mais c’était déjà le cas à la présidentielle. Là, c’est soudain“, considère Lina, étudiante de 24 ans, qui vit à Villemomble. “On est dans une commune qui vote traditionnellement à droite, donc bon. Ce qui me frappe, c’est qu’on mette sur le même plan le Rassemblement national et le Front populaire“, analyse Michèle, croisée devant le Monoprix. “Je ne prends pas parti, mais les gens veulent de l’ordre. On ne sait plus comment parler aux jeunes par exemple. Moi-même, j’ai peur de leurs réactions“, fait savoir une dame qui préfère rester anonyme. Pour Thérèse, 69 ans, qui remonte le chemin de la gare RER vers le centre-ville, “Gagny a beaucoup changé, avec de plus en plus de constructions. Je ne dis pas que ce soit mauvais en soi, mais le problème, ce sont les locataires qui s’installent. Ça a beaucoup changé la physionomie de la ville“, lâche-t-elle.

Rien de bon ne va sortir de tout ça

Pour beaucoup, c’est le choix de la dissoudre l’Assemblée nationale qui a surtout estomaqué. “J’ai toujours voté, mais cette fois je ne sais pas pour qui. Je pense que je vais me décider la veille. Il n’est d’ailleurs pas impossible qu’il y ait une triangulaire comme on en connaissait avant. En tout cas, rien de bon ne va sortir de tout ça“, poursuit Thérèse. “Macron a pété un câble, quelle idée ! Il a fait un caprice après l’échec de son parti et il en renvoie la responsabilité aux Français“, opine Trung. “C’est sûr qu’on peut se poser des questions après les [ndlr élections] européennes. Mais, je ne suis pas certaine que les gens voteront de la même manière aux législatives“, relativise sa compagne Maryse, la soixantaine. “C’est le vote des personnes âgées qui a fait monter le score au RN, mais on attend une participation beaucoup plus forte. On reste quand même dans une ville tranquille où il n’y a pas vraiment de problèmes”, poursuit-elle. Le couple, qui ne fait pas mystère de ses affinités à gauche, reconnaît par ailleurs des qualités aux projets du maire (LR), Roland Cranoly. Assise dans un abribus, Assia (son prénom a été modifié), observe la situation avec dégoût. “Les immigrés, les immigrés ! C’est toujours la même musique. On est venu du Maroc il y a quarante ans. Mon mari a travaillé dans les égouts sans jamais être au chômage. Il est mort il y a trois ans. Mes trois enfants sont nés ici. On n’a jamais demandé un centime d’aides sociales. Mais il y a toujours cette musique. La politique ne m’intéresse pas, ce n’est pas pour moi“, fustige-t-elle avant de s’engouffrer dans son bus.


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Cet article est publié dans avec comme tags Front populaire, , Législatives 2024, RN, Seine-Saint-Denis
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