Justice | | 08/03
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Agression policière en plein procès d’Assises à Créteil : 8 mois de prison avec sursis requis

Agression policière en plein procès d’Assises à Créteil : 8 mois de prison avec sursis requis © CD

Rejetant le motif de la légitime défense, le parquet de Créteil a requis huit mois d’emprisonnement avec sursis jeudi soir contre un policier du Val-de-Marne jugé en correctionnelle pour avoir été violent envers un accusé pendant un procès d’assises, et pour outrage sexiste envers une collègue.

Le fonctionnaire de 30 ans comparaissait pour violences par personne dépositaire de l’autorité publique sur un homme de nationalité égyptienne, jugé un an plus tôt lors du procès du meurtre de Vanesa Campos, Péruvienne trans de 36 ans tuée par balle en 2018 au bois de Boulogne. Lors d’une suspension d’audience, ce 17 mars 2023, au cœur de ce procès à l’ambiance tendue, une altercation avait éclaté entre la victime et le policier.

Ce dernier assure avoir agi en légitime défense face à un prévenu récalcitrant qui l’a blessé au front, tandis que la victime – absente lors de l’audience jeudi – maintient que le fonctionnaire l’a violemment frappée après l’avoir agressée verbalement.

Le fonctionnaire était également jugé pour “outrage sexiste” envers une collègue, membre de l’escorte policière de l’homme qui a dénoncé ces violences.

Pour ces faits, le ministère public a requis un stage de prévention au sexisme, saluant au passage le “courage” de la fonctionnaire qui s’est constituée partie civile. Le parquet a aussi requis l’interdiction de faire partie d’une escorte judiciaire et de paraître au tribunal de Créteil pendant deux ans. Pendant presque cinq heures d’audience dans une salle pleine à craquer – plusieurs policiers étant venus y assister -, les différentes parties ont opposé leurs versions des faits, extraordinaires de par le lieu où ils se sont déroulés.

Ces propos ne correspondent pas à l’image de la police qu’on devrait donner”

Tout part d’un quiproquo : ce 17 mars, l’accusé égyptien se lève dans son box pour soulager des douleurs, avec autorisation préalable de la présidente. Autorisation qui n’est pas communiquée au policier qui lui intime donc de se rasseoir.

Puis, lors d’une suspension d’audience, l’accusé fait part au policier de son intention de rapporter à la présidente des propos agressifs que ce dernier lui aurait tenus. “Et c’est à ce moment-là que vous l’auriez saisi par le cou et cogné contre le mur”, résume celle-ci, s’adressant au fonctionnaire. Derrière la porte, plusieurs avocats entendent alors “un bruit sourd, des hurlements de douleur, cris et pleurs”.

Pour le prévenu, au contraire, c’est l’accusé qui s’est montré “hostile”, l’a insulté et frappé. “Quand j’ai reçu le coup au visage, j’étais sonné, j’ai répliqué immédiatement, je n’ai jamais cherché à le nier. Au moment où j’ai porté les coups, j’ai fait en sorte de l’amener au sol, demandé au policier derrière de lui passer les menottes”, détaille-t-il à la barre.

Survient ensuite un “coup de chaud” quand arrive sa collègue de l’escorte qui exprime être choquée par la situation. Il lui lance d’aller “sucer son pote” (en référence à l’accusé). “Elle m’a dit que c’était à cause de moi que tous les policiers de France étaient détestés, j’ai répondu du tac au tac”, argue-t-il.

“Ces propos ne me correspondent pas et ne correspondent pas à l’image de la police qu’on devrait donner, (…) ça m’écœure”, rétorque la policière à la barre. Elle assure que le policier l’a traitée de “bonne à rien” et lui a tenu des propos plus grossiers que ceux rapportés.

“Omerta”

Ce procès n’est “pas [celui] de la police”, répète néanmoins la procureure à plusieurs reprises. C’est pourtant autour du “professionnalisme” du prévenu que tournent notamment les débats. Les policiers de l’escorte ont pour mission de procurer “un minimum de sérénité” dans leur traitement des accusés, rappelle Antoine Aussedat, avocat de la victime alors accusée. Si la policière n’avait pas parlé, “l’omerta aurait régné et ce dossier aurait été enterré”, plaide-t-il, avant de louer le rapport fait par un autre policier de l’escorte, seul témoin oculaire de l’altercation.

Document balayé par Jérôme Andrei, avocat de la défense, pour qui l’enquête a été menée “exclusivement à charge dans un délai record” de deux mois. “Il fallait vite trouver un responsable et un coupable à tout ça”, regrette-t-il. Et de charger la policière qui a dénoncé l’outrage sexiste, “incontrôlable” sur le moment, prête à “découper” son client. Il a plaidé la relaxe.

Décision attendue le 4 avril.

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