Pressenties pour étrenner le port de l’uniforme, les écoles Varlin et Vallès à Aubervilliers n’expérimenteront pas cette mesure, trop controversée.
“L’uniforme ni ne masque ni ne combat les inégalités scolaires et sociales“, réagissent les syndicats d’enseignants Sud, CGT et FSU. Dans un communiqué, ils annoncent que, réunies en conseil des maîtres, les équipes des écoles élémentaires Varlin et Vallès “par une large majorité (…) ont décidé de s’opposer au port de l’uniforme.“
“Créer un sentiment d’appartenance“
Karine Franclet, maire (UDI) de la commune, avait annoncé, le 21 décembre, en conseil municipal, l’expérimentation, sur une durée de deux ans, de cette mesure voulue par le gouvernement.
Ancienne principale de collège, elle s’était félicitée pour cette initiative qu’elle avait qualifié d’innovante. “Je pense que cela peut être un moyen de créer un sentiment d’appartenance” au regard des difficultés extérieures au cadre scolaire, et “que c’est aussi une mesure de justice sociale. Il n’y aura pas de reste à charge pour les familles“, avait-elle défendu, assurant un co-financement à parts égales ville-État. “Ce n’est pas l’uniforme qui réglera toutes les inégalités scolaires“, avait-elle toutefois reconnu, tout en affirmant la fierté de la ville d’expérimenter la mesure.
Soutien indispensable des enseignants
“Ce dont les écoles, les élèves et les personnels ont besoin, c’est d’une baisse des effectifs par classe, du remplacement des professeurs absents, d’un recrutement des AESH (assistants pour les élèves porteurs de handicap), d’ATSEM dans toutes les classes de maternelle, d’écoles saines…”, rétorquent les syndicats. Pour eux, le compte n’y est pas non plus au plan financier. Ils estiment à 45 000 euros le coût des uniformes, soit 100 euros par élève. “Pour rappel, actuellement, la mairie débourse 37 euros par an et par élève pour l’achat du matériel pédagogique“, calculent-ils.
“Je prends acte du refus des enseignants des écoles Varlin et Vallès concernant l’expérimentation de l’uniforme. Il est primordial que les enseignants adhèrent pleinement à un tel projet pour qu’il puisse aboutir“, réagit Karine Franclet. “Avant de proposer cette mesure, j’ai initié un processus de concertation comprenant trois réunions : une avec les inspecteurs, une avec les directeurs d’école, et enfin une avec les enseignants. Imposer cette mesure sans leur soutien serait inapproprié“, précise-t-elle, estimant cependant que cette mesure est “particulièrement pertinente pour la Seine-Saint-Denis, en particulier pour Aubervilliers, car elle vise à créer un environnement propice à l’apprentissage tout en allégeant le fardeau financier des familles. En tant qu’ancienne cheffe d’établissement, je comprends les défis auxquels les familles sont confrontées, et je soutiens pleinement les initiatives qui offrent à chaque enfant la meilleure chance possible d’apprendre“, ajoute-t-elle.
Faux problème
“Ça ne se fera pas, ce n’est peut-être pas plus mal. On avait appris la nouvelle par la presse, ce qui n’est déjà pas top. Mais je n’avais pas d’opposition franche, parce que, pour certains enfants, l’uniforme pouvait enlever une certaine pression. Il aurait peut-être fallu en parler avant avec plus de temps“, considère Jennifer (son prénom a été changé à sa demande) croisée ce mercredi matin devant le groupe scolaire Varlin-Vallès.
Du côté de l’union locale de la FCPE, l’opposition à une tenue unique est en revanche franche. “À aucun moment nous avons été concertés. Ces écoles sont à l’image des besoins du 93 : il faut en rénover le bâti, remplacer les profs absents… Au lieu de ça, la priorité, c’est l’uniforme, ça n’a pas de sens. C’est même un faux problème puisque, si la ville a dit que les tenues seraient payées à 50/50 avec l’État, il faudra bien les entretenir et les laver. Les enfants des familles les plus pauvres qui ne pourront pas le faire, se retrouveront encore plus stigmatisés“, réagit Éric Muller, père de trois enfants scolarisés dans la commune et élu FCPE.
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