Lancé à la hâte pour s’inscrire dans le calendrier des Jeux olympiques, le projet de taxis volants a tourné court. Ce mercredi 18 décembre, le Conseil d’État a donné le coup de grâce après une série de revers.
Saisi en référé (procédure d’urgence qui ne juge pas sur le fond mais sur le bien fondé de suspendre une action en attendant de juger), le Conseil d’État avait accordé un feu vert provisoire en juillet, à l’exploitation d’une plateforme de décollage et d’atterrissage de ces aéronefs, dite “vertiport”, installée au niveau d’Austerlitz (est). Ce mercredi, elle a donné raison sur le fond aux opposants, dont la ville de Paris, qui devait accueillir le vertiport.
Parmi les requérants, figuraient aussi plusieurs associations de lutte contre les nuisances aériennes – dont l’Union française contre les nuisances des aéronefs (UFCNA). Les défenseurs du projet étaient le gouvernement et le groupe ADP (Aéroports de Paris), gestionnaire des aéroports parisiens, dont l’État est actionnaire à 50,6%. ADP portait ce projet avec le constructeur aéronautique allemand Volocopter.
Volocopter et ADP voulaient démontrer la faisabilité d’un nouveau mode de transport en zone urbaine dense, en faisant circuler ces appareils à décollage et atterrissage vertical (VTOL en anglais) entre plusieurs “vertiports”, dont certains situés à proximité d’aéroports ou d’héliports franciliens. L’un d’eux, à Saint-Cyr-l’Ecole (Yvelines) près de Versailles, a été inauguré début août.
Les requérants estimaient que le gouvernement aurait préalablement dû consulter l’Autorité de contrôle des nuisances aériennes (Acnusa), comme le prévoit la loi.
Le Conseil d’État a en outre condamné l’Etat à verser “une somme globale de 3 000 euros à l’UFCNA et autres et une somme globale de 3 000 euros à la ville de Paris et autres” au titre des frais de justice.
Cette décision intervient après une série de revers pour ce projet dont les promoteurs voulaient initialement profiter de la vitrine des Jeux olympiques et paralympiques, afin de mettre en vedette un moyen de transport innovant et décarboné. L’arrêté signé le 4 juillet par le ministre délégué chargé des Transports de l’époque, Patrice Vergriete, limitait du reste l’expérimentation d’Austerlitz au 31 décembre. Ils avaient toutefois dû y renoncer début août en raison de défauts sur les moteurs. Dans sa version actuelle, l’aéronef à deux places – dont celle du pilote, est équipé de batteries alimentant 18 rotors disposés en couronne au-dessus du cockpit.
Le projet, évoqué depuis fin 2020, avait déjà vu ses ambitions révisées à la baisse avant l’été, Volocopter n’ayant pas obtenu à temps une certification de l’agence européenne de sécurité aérienne (AESA) pour accueillir des passagers payants.
En novembre, le conseil régional d’Ile-de-France a annulé la subvention d’un million d’euros accordée un an plus tôt à ADP, invoquant les retards du projet, techniques et réglementaires.
Sollicité par l’AFP, le cabinet de son successeur démissionnaire, François Durovray, n’a pas souhaité faire de commentaire mercredi. Le Groupe ADP, pour sa part, n’a pas réagi dans l’immédiat.
Le groupe communiste de la région Ile-de-France, qui avait dénoncé le projet depuis le départ, s’est au contraire félicité de cette “sanction administrative naturelle au regard des entorses à la loi et des passe-droits que les promoteurs de ces projets se sont octroyés”. Et de rappeler que le vertiport parisien et le déploiement des taxis volants avaient reçu des avis défavorables de la part d’une commission d’enquête publique et de l’autorité environnementale. “Ces autorités indépendantes pointaient notamment le défaut
d’information de la population et les impacts environnementaux des taxis volants”, insiste le groupe.
Un mode de transport qui pourrait être utile pour des évacuations sanitaires
Le ministère des Transports et ADP ont préféré insister ces derniers mois sur l’utilité de ces engins – dans de futures versions plus grandes – pour effectuer des évacuations sanitaires ou des transports d’organes, plutôt que de parler de “taxis volants” associés à un mode de déplacement pour les plus riches.
Alors que ce projet a rencontré l’hostilité des élus municipaux de Paris, de la majorité comme de l’opposition, ADP l’a défendu au nom de l’innovation face à une concurrence étrangère qui s’exacerbe. De fait, les États-Unis ont créé fin octobre les bases réglementaires de l’exploitation commerciale de tels engins.
Lors de l’annonce de l’annulation de sa subvention au projet, le cabinet de la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, avait assuré que cela ne remettait pas en cause le soutien de la collectivité à l’innovation en général et aux VTOL en particulier.
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