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Dématérialisation et RDV impossible en préfecture : la Défenseure des droits dénonce des “atteintes massives aux droits” des étrangers

Dématérialisation et RDV impossible en préfecture : la Défenseure des droits dénonce des “atteintes massives aux droits” des étrangers © Charles Henry

L’explosion des réclamations contre les problèmes informatiques liés à la dématérialisation des titres de séjour “porte atteinte aux droits” des étrangers avec des conséquences graves, alerte mercredi le Défenseur de droits pour qui des solutions simples peuvent y remédier.

Un peu plus de cinq ans après le déploiement de l’administration numérique pour les étrangers en France (Anef), portail web sur lequel un usager peut déposer une demande ou un renouvellement de titre de séjour, le Défenseur des droits dresse un bilan sévère.

L’institution a enregistré une augmentation de 400 %, entre 2020 et 2024, du nombre de réclamations en matière de droits des étrangers.

En 2023, le sujet représentait un quart du total des requêtes reçues par l’institution. Il devrait être d’un tiers en 2024 d’après des chiffres provisoires, quand il n’était que de 10% en 2019, alerte le Défenseur des droits.

Dans l’immense majorité, ce sont les titres de séjour et leur renouvellement qui plongent les étrangers dans des situations dramatiques. Des dysfonctionnements informatiques ne leur permettent pas d’accomplir leurs démarches et notamment d’obtenir des rendez-vous et ils ne sont plus en règle administrativement.

Impossibilité d’ajouter des pièces jointes, de modifier ses coordonnées ou son mot de passe, incapacité à réaliser simultanément plusieurs démarches sur la plateforme, figurent dans la liste des problèmes rapportés par les usagers.

Parmi les personnes touchées, un nombre croissant correspond à des étrangers en situation régulière sur le territoire, parfois depuis de très nombreuses années et, pour certains, titulaires de titres de séjours pérennes comme des cartes de résidents de 10 ans, note le rapport.

Or, faute de pouvoir débloquer leur situation administrative avec la préfecture, certaines personnes perdent leur travail ou subissent des ruptures de droits avec l’interruption de versements de prestations sociales.

Comme Jacqueline, 51 ans, qui a raconté à l’AFP que son mari ne parvenait pas à obtenir de rendez-vous à la préfecture de l’Isère pour renouveler son titre de séjour.

À cause de sa situation, la formation qu’il effectuait cet automne a été interrompue au bout de deux semaines et il n’a pas été payé, déplore-t-elle, alors que les factures s’accumulent.

La dématérialisation des demandes de titres de séjour avait été expérimentée en 2020 pour les étudiants étrangers avant de leur être imposé l’année suivante. Courant 2023, le recours à ce dispositif était rendu obligatoire pour un plus large public (conjoints et enfants de français).

Le programme, qui s’inscrit dans le “choc de simplification” des démarches administratives annoncé en 2013 par l’ex-président François Hollande, “n’a pas tenu ses promesses” de fluidifier les procédures, souligne l’autorité indépendante, déplorant que l’outil informatique ait été déployé “à la hâte au terme d’expérimentations insuffisantes”.

“L’Anef contribue même, à rebours de ses ambitions affichées, à l’aggravation des difficultés qui lui préexistaient en affectant des usagers du service qui, jusqu’alors, semblaient relativement épargnés”, cingle-t-elle.

“Nous ne disons pas que la procédure ne peut pas être dématérialisée mais il faut l’accompagnement nécessaire. On a réduit les effectifs dans les préfectures beaucoup trop tôt”, pointe la Défenseure des droits Claire Hédon, interrogée par l’AFP. Pourtant, il “existe des solutions”, insiste-t-elle.

L’institution recommande ainsi de permettre le dépôt d’un dossier papier en cas de problème rencontré sur la plateforme. Elle préconise également le renouvellement automatique des attestations provisoires délivrées le temps que les demandes de titres de séjour soient instruites par le préfet.

“Il y a moyen d’agir sans changer les règles, c’est une urgence”, insiste Claire Hédon.

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