Sécurité | Seine-Saint-Denis | 19/04
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Dix maires organisent un rassemblement contre le trafic de cigarettes en Seine-Saint-Denis

Dix maires organisent un rassemblement contre le trafic de cigarettes en Seine-Saint-Denis

Alors que les opérations “Place nette” en Seine-Saint-Denis s’achèvent, marquées par quelques saisies record, les maires de dix villes de Seine-Saint-Denis organisent un rassemblement lundi 22 avril pour interpeller l’État sur le manque de moyens pour lutter contre le trafic de cigarettes au quotidien.

Aux Quatre Chemins, la circulation automobile sera impossible lundi prochain entre 18h00 et 19h30. Situé à la lisière d’Aubervilliers et de Pantin, le carrefour est emblématique de la vente à la sauvette des “Malboro bled”, ces cigarettes de contrebande vendues à la sauvette. C’est là que les élus des deux communes, de Bagnolet, Bobigny, La Courneuve, Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-Sec, Romainville et Saint-Ouen, organisent un rassemblement pour afficher un front commun face à ces trafics.

SOS habitants et commerçants en détresse : face à un phénomène qui a pris une ampleur sans précédent, nous refusons de rester bras croisés“, écrivent-ils en gras sur leur manifeste. Ils pointent les graves nuisances en termes de sécurité publique que ce trafic entraine, insistant notamment sur “les insultes sexistes” et le “harcèlement de rue.”

Lire : Bobigny : le ras-le-bol des habitants et élus face au trafic de cigarettes

Objectif du rassemblement : demander à l’État “une véritable mobilisation des forces de police nationale, des douanes, de la justice“, face à des “réseaux très structurées que nos villes ne peuvent, seules, démanteler.”

La situation n’a jamais été aussi dégradée

Cette mobilisation intervient pourtant alors que viennent de s’achever les opérations “Place nette XXL” de lutte contre la délinquance. Après trois semaines, le dispositif mené en Seine-Saint-Denis s’est traduit par 120 000 euros et 32 772 paquets de cigarettes de contrebande saisis. En avril, les gendarmes avaient par ailleurs découvert 13 tonnes de cigarettes de contrebande, évaluées à environ 2,5 millions d’euros sur le marché noir. Neuf hommes avaient alors été interpellés en flagrant délit aux Pavillons-sous-Bois.

Lire : 44 000 cartouches de cigarettes de contrebande saisies à Pavillons-sous-Bois

Pour les élus, le compte n’y est pas. “La situation n’a jamais été aussi dégradée“, estiment-ils. “Malgré nos demandes répétées, le phénomène reste sous-estimé par l’État, qui ne prévoit qu’un renfort temporaire des forces de police durant la période des JOP [ndlr,les jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024]. Qu’adviendra-t-il de nos territoires à la clôture des Jeux ? Comment peut-on répondre à la colère de notre population lorsque l’on compte seulement 34 policiers pour 10 000 habitants contre 44 dans les Hauts-de-Seine, et pas plus de 58 magistrats du parquet, soit plus de trois fois moins que la recommandation du Conseil de L’Europe ?“, interrogent-ils.

On vide la mer à la petite cuillère

Un sentiment d’abandon dénoncé fin mars par Bertrand Kern, le maire (PS) de Pantin, à l’occasion de la présentation du premier rapport de l’intercommunalité Est Ensemble sur l’engagement de l’État. “Les gens viennent nous dire : faites quelque chose ! On n’en peut plus de la station de métro Hoche et de celle des Quatre Chemins ! On n’est plus en sécurité !” Ils viennent nous voir pour mettre un terme à ce trafic alors que c’est un trafic international. Le maire, avec sa police municipale, ne peut faire qu’une seule chose : saisir le paquet de cigarette et on vide la mer à la petite cuillère“, avait-il déploré. L’édile avait aussi témoigné de la baisse des effectif de police dans sa commune. “En 2002, le commissariat de Pantin, qui est logé dans un bâtiment municipal, comptait entre 135 et 140 policiers nationaux pour une population de 49 934 habitants. Aujourd’hui, nous en avons entre 115 et 120 pour 69 900. Les citoyens n’ont plus de réponses de la police“, résumait-il.

Lire : Caf submergée, pénurie de profs et de policiers… des maires de Seine-Saint-Denis accusent

Plus de moyens pour lutter contre les trafics

Dans ce contexte, les maires des dix villes adressent à l’État une liste de doléances : la création d’une brigade de lutte anti-trafics de la police nationale à l’échelle du département sur le modèle des brigades d’enquête spécialisée parisiennes ; des renforts de policiers nationaux pour assurer une présence régulière sur les principaux lieux de trafic de nos communes ; et la mise en place d’un groupe local de traitement de la délinquance (GLTD) rattaché au tribunal judiciaire de Bobigny et au Procureur de la République pour adapter et renforcer la réponse judiciaire vis-à-vis des trafiquants et des revendeurs. Ils réclament aussi la mobilisation d’une partie des recettes liées aux taxes sur le tabac pour lutter contre les trafics et pour abonder les fonds des politiques de prévention et d’insertion par l’emploi de nos territoires.

Au volet social, ils réclament “les moyens d’un accompagnement social, sans lequel les vendeurs restent prisonniers des systèmes qui les exploitent“, tout en précisant qu’ils refusent “une vision fataliste et complaisante“, affirmant “le droit [de nos territoires] à la tranquillité et à la sécurité, tout comme les publics en grande précarité ont droit à un autre horizon.” Ils veulent par ailleurs qu’une partie des recettes liées aux taxes sur le tabac soient mobilisées pour lutter contre les trafics et pour abonder les fonds des politiques de prévention et d’insertion par l’emploi de nos territoires.

Enfin, les élus demandent un bilan des actions du grand “plan tabac 2023-2025” annoncé en 2023. Thomas Cazenave, ministre délégué, chargé des Comptes publics, en avait présenté en novembre les premiers résultats, après une année de déploiement. “Avec près de 503 tonnes saisies au 1er décembre, l’année 2023 est d’ores et déjà une année exceptionnelle en matière de résultats dans la lutte contre la contrebande de tabacs et confirme la hausse tendancielle des saisies douanières de tabacs en France, constatée ces dernières années“, notait-il. Mais “pourquoi ce plan n’est-il pas déployé sur nos territoires ?” interrogent cependant les dix maires à l’initiative de la mobilisation.

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