Bénévoles des JOP, employés des transports, policiers, hôteliers… En première ligne pour gérer l’afflux de 15 millions de touristes en Ile-de-France pendant les Jeux, bénévoles et pros se préparent comme ils peuvent pour maitriser les rudiments d’anglais.
“J’espère que ça ne va pas faire fuir les clients!” Derrière le comptoir de sa brasserie de Saint-Ouen, au nord de Paris, Matthieu confesse “une certaine appréhension” à l’idée de parler l’anglais, qu’il maîtrise mal, pendant les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) cet été.
Comme ce restaurateur de 39 ans, ils seront nombreux sur le pont, pendant les JO puis les JOP. Parmi les défis à relever : se faire comprendre, alors que 2 millions de touristes venant de l’étranger sont attendus, d’après une étude de l’office de tourisme parisien. L’occasion de redorer le blason du pays concernant son niveau d’anglais, classé au dernier rang de l’Union européenne selon l’indice des compétences anglophones EF-EPI 2023.
“J’ai un niveau scolaire”, poursuit Matthieu, “pas habitué à parler autre chose que (sa) langue maternelle” à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), où se situe le village des athlètes. Ce matin de mai, il a reçu une brochure pour l’accueil des touristes de la part de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) francilienne et de Choose Paris Region, agence chargée de la promotion de l’Ile-de-France. Mais au-delà de conseils comme “évitez les acronymes” ou “utilisez des mots simples”, rien ne figure pour aider les commerçants dans une autre langue.
“S’il y avait une formation en anglais dispensée par la région, je ne dirais pas non”, opine, avec un grand sourire, Aouatef, boulangère à Saint-Ouen. La commerçante de 48 ans, qui a annulé ses vacances pour travailler pendant les Jeux, ne s’inquiète pas : “Je me débrouille avec des gestes.” Et deux de ses salariés parlent anglais et espagnol.
Avant 2018, Choose Paris Region délivrait des ateliers linguistiques d’une dizaine d’heures aux professionnels du tourisme. Depuis, ceux-ci “se forment en interne, via le compte personnel de formation (CPF), sans passer par nous”, indique Anne Christine-Bulourde, chargée de mission à l’agence.
Quant aux hôteliers, ce type de formation ne serait plus pertinente pour eux en raison du “rajeunissement du personnel, qui connaît naturellement l’anglais aujourd’hui”, défend David Zenouda, vice-président de l’Union des métiers et des industries de l’Hôtellerie (Umih) en Ile-de-France.
Dans la formation des 45 000 bénévoles des Jeux, pas d’impasse sur les langues : une partie des modules en ligne, non obligatoires, sont prévus pour l’accueil du public et la sécurité en anglais.
“Les informations sont détaillées, il y a des mises en situation, tout est très bien fait”, encense Karima, 55 ans, affectée au Stade de France. Cette fonctionnaire est l’une des rares bénévoles à avoir consulté ces modules, parmi la dizaine rencontrée par l’AFP fin mai devant le centre parisien des accréditations.
Pour améliorer son anglais “basique”, Dramane, chargé de l’accueil au Parc des Princes, préférerait des ateliers en présentiel. “C’est dommage qu’on n’ait pas été consulté pour le contenu de la formation”, regrette le chauffagiste de 39 ans.
Les sociétés de transport, elles, misent sur des applications de traduction instantanée pour soulager leurs agents. “C’est assez basique, mais on peut traduire du vocabulaire ferroviaire facilement et rediriger vite les gens”, décrit Damien, agent SNCF au nord de Paris, en faisant défiler l’application TradSNCF sur son téléphone. L’anglais ou l’espagnol ne sont pas un souci pour le jeune homme de 26 ans, mais l’outil fonctionne dans une palette de langues comme le mandarin, le japonais ou l’indonésien.
“On avait un vrai sujet car nos agents n’avaient pas la capacité de répondre à toutes les langues de nos clients”, expliquait Valérie Gaidot, responsable expérience client à la RATP, au lancement de l’application Tradivia en novembre.
Quant à l’académie de police, elle propose à ses agents des stages intensifs d’une semaine axés sur l’expression orale en anglais, allemand, italien ou espagnol, d’après le site officiel de la police nationale.
par Clément KASSER
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