En Seine-Saint-Denis, les violences faites aux femmes ne reculent pas

Le meurtre d’Agathe, 38 ans, à Montfermeil le 19 février, rappelle combien il reste difficile de faire reculer les violences faites aux femmes. Après une baisse entre 2019 et 2020, le nombre de tentatives d’homicides et de féminicides conjugaux connait de nouveau une hausse depuis 2022. Tendance qui s’est confirmée en 2023 avec 14 faits constatés. “On sait par ailleurs que 40 femmes ont tenté ou se sont suicidées suite à des violences conjugales en Seine-Saint-Denis. Mais, ces morts ne s’ajoutent pas au bilan des féminicides, alors que c’est pourtant bien le cas“, regrette AbigaIl Vacher, chargée de projet à l’Observatoire départemental des violences faites aux femmes.

De plus en plus de femmes victimes accompagnées

La Seine-Saint-Denis déplore déjà quatre féminicides depuis le début de l’année, sur les 31 commis dans l’Hexagone. “Un décompte qui ne cesse de nous glacer le sang et contre lequel il est possible d’agir. Ce qui nous a été prouvé le 7 février avec ce féminicide à Noisy-le-Grand qui a pu être évité grâce au téléphone grave danger“, pointe Stéphane Troussel. En 2023, 74 femmes ont été admises au dispositif téléphone grave danger, contre 50 en 2022.

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Quelque 8 920 faits de violences conjugales ont été constatés en 2023. Malgré une tendance à la hausse de 2,3% depuis 2017, Abigaïl Vacher veut y voir un signe “positif”. “Cela ne signifie pas qu’il y a plus de femmes victimes, mais qu’elles se signalent davantage“, considère-t-elle. A cet égard, elle souligne le rôle moteur des intervenants sociaux qui ont pris en charge 2 398 femmes victimes dans les commissariats de police l’année dernière.

Autre progrès de la mobilisation contre les violences faites aux femmes, le nombre de personnes accompagnées par des associations a continué d’augmenter en 2023. Avec environ 2 000 femmes reçues en 2023, le nombre de victimes de violences conjugales reçues par l’association SOS Victimes 93 a doublé entre 2017 et 2023. Le Centre d’information sur les droits des femmes et des familles (CIDFF) 93 a, quant à lui, reçu 3 300 femmes victimes de violences. Environ 600 femmes ont, par ailleurs, été accueillies ou hébergées et/ou accompagnées par SOS Femmes 93, 2 000 par l’Amicale du nid 93 et 144 jeunes femmes accompagnées par LAO Pow’her.

Réformer l’ordonnance de protection

Parmi les marges de progression identifiées par l’Observatoire, figure le renforcement du questionnement systématique dans les services sociaux pour mieux repérer les violences conjugales.

Pour la directrice de la structure, Ernestine Ronai, qui préside également le Comité de pilotage national de l’ordonnance de protection, il faut aussi réformer la procédure de l’ordonnance de protection. “Si on veut moins de femmes abîmées, moins de femmes tuées, il faut que le nombre d’ordonnances de protection augmente. Depuis un certain nombre d’années, nous militons pour que la loi change et que l’on retire la notion de “danger vraisemblable” qui est plus sujette à interprétation, et donc plus complexe“, pointe-t-elle.

Pour que cette procédure soit accordée, il faut prouver qu’il y a violence et danger vraisemblables. En Seine-Saint-Denis, le nombre de requêtes en ordonnance de protection déposées et le nombre de décisions rendues augmentent respectivement de 25% et de 13%. Mais le taux d’acception est en baisse en 2023 avec 61% d’ordonnances délivrées par le tribunal de Bobigny contre 67% en 2022 (69% au niveau national).