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Justice | Ile-de-France | 28/08
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Ile-de-France : la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) en grève contre le non-renouvellement de ses contractuels

Ile-de-France : la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) en grève contre le non-renouvellement de ses contractuels © Snpes/PJJ FSU

Éducateurs, psychologues, travailleurs sociaux… En Ile-de-France, 30 postes de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) seraient concernés par le gel des contrats de contractuels à compter du 1er septembre. Un plan d’économies dénoncé par l’intersyndicale SNEPES-PJJ FSU, CGT PJJ-Justice, Interco PJJ-CFDT et Unsa SPJJ qui compte mobiliser les personnels ce jeudi après une première journée de débrayage le 14 août.

C’est un plan social qui met à mal nos missions et les usagers puisqu’un grand nombre ne pourront pas être pris en charge“, ne décolère pas Cécile Rouibah, secrétaire régionale CGT PJJ-Justice Ile-de-France et Outre-Mer. Pour elle, la décision annoncée le 26 août par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) de ne pas renouveler un certain nombre de postes, est une absurdité. “Même si l’administration refuse toujours de chiffrer précisément le nombre de contractuel.les qui seront concerné.es par les non-renouvellements (…) nous estimons que cela concernera en moyenne 50 collègues par région. Ce qui pourrait représenter 500 professionnels et professionnelles sous contrat ! C’est du jamais vu à la PJJ !“, fustige le communiqué de l’intersyndicale du 22 août.

30 équivalents temps plein non renouvelé en Ile-de-France

Dans la direction, Ile-de-France et Outre-Mer, le coup de rabot est surtout porté sur des postes d’éducateurs en centre éducatif fermé (CEF) et en unité éducative d’hébergement collectif (UEHC). Soit 30 équivalents temps plein sur 2 000 agents environ dont 530 contractuels. Sur la forme, les syndicats condamnent la brutalité de la mesure. “Les agents concernés ont été prévenus entre le 28 juillet et le 10 août que leur contrat ne serait pas renouvelé au 31 août au soir, alors qu’ils étaient en congé. Vous imaginez la violence de la méthode ? Certains se retrouvent même avec un délai prévenance qui n’est pas légal“, souffle Cécile Rouibah.

La mesure suscite d’autant plus l’incompréhension, que l’intersyndicale explique avoir obtenu un dégel budgétaire du garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, avant la grève du 14 août. “La DPJJ a confirmé [à l’issue d’une audience lors de cette journée de mobilisation] qu’elle n’utiliserait pas les 3 millions [d’euros] débloqués (…) aux fins du renouvellement de tous les contrats indispensables au bon fonctionnement des services,” précise son communiqué, déplorant au passage une “posture irresponsable” de la DPJJ qui “assume se plier au régime drastique de Bercy.” À l’échelle nationale, le SNEPES-PJJ FSU, la CGT PJJ-Justice, l’Interco PJJ-CFDT et l’Unsa SPJJ appelle les 9 000 agents, dont 2 000 contractuels à débrayer.

De son côté, la DPJJ assure que “ce déblocage permettra (…) de solutionner en grande partie les difficultés de renouvellement de contrats auxquelles elle est confrontée“, évoquant “les contrats pour lesquels une annonce écrite en ce sens avait été faite aux agents concernés ou des contrats envoyés“. Elle précise que “cet abondement de crédit doit cependant s’accompagner de mesures de pilotage rigoureux (des recrutements qui seront présentées lors des RDV budgétaires de la rentrée) afin de respecter le schéma d’emploi fixé au regard de la loi de finances pour 2024. En effet, tous les contrats arrivant à échéance fin août n’ont pas vocation à être renouvelés, comme par exemple les contrats courts conclus en renfort pour la période des jeux olympiques en anticipation d’un éventuel surcroit d’activités sur la période, ou des contrats conclus en dépassement dudit schéma d’emploi de la direction et non encore renouvelés“.

Un éducateur pour 25 jeunes en moyenne

Sur le fond, les syndicats déplorent l’impact de ces économies sur les conditions de suivi des mineurs dans un contexte déjà dégradé. “Depuis l’entrée en vigueur du code de la justice pénale des mineurs, les éducateurs suivent 25 jeunes en moyenne, ce qui est déjà trop. Je crains que l’on dépasse ce quota au détriment de la qualité de l’accompagnement“, explique Cécile Rouibah. “En milieu ouvert, la loi nous impose de recevoir les jeunes dans les cinq jours après être passé devant un magistrat (juge d’instruction ou juge pour enfant). J’ai des services qui vont être au 1er septembre à 100 mesures en attente. Donc, on ne pourra pas tous les recevoir“, ajoute-t-elle. Même constat, selon elle, pour la réalisation du DIPC (document individuel prise en charge) qui formalise, depuis 2002, le suivi du mineur. “On a plus les moyens de faire ça“, souffle la déléguée syndicale qui va même jusqu’à évoquer le risque que “l’on ne soit plus en mesure de respecter la convention internationale des droits de l’enfant.”

Un contractuel qui va manquer, c’est 25 jeunes impactés. La charge va retomber sur les titulaires, ce qui va nécessairement se répercuter sur la prise en charge“, résume de son côté Aurélie Posadzki. “Ce qui est injuste car le 93 avec toutes ses spécificités est le territoire qui mériterait d’être le plus défendu parce qu’il y manque déjà beaucoup de moyens et de personnels“, poursuit-elle, estimant toutefois que “la Seine-Saint-Denis est peut-être le territoire [en Ile-de-France] qui souffre le moins du non-renouvellement des contrats“.

Avec ces mesures, on va encore plus galérer pour recruter

Si les syndicats espèrent que la mobilisation finira par payer, Cécile Rouibah entrevoit d’ailleurs des conséquences à plus long terme. “Depuis le covid, le médico-social n’est plus du tout attractif. Chaque année, nos promotions de formation comptaient 140 à 160 agents stagiaires. Au 1er mars 2024, ils étaient moins de 100. Avec ces mesures, on va encore plus galérer pour recruter. En moyenne, on met déjà entre deux et six mois pour combler un poste vide par un contractuel, sans compter le temps de formation supplémentaire au pénal“, indique-t-elle. “Si on nous redonne les moyens budgétaires supprimés, il faudra tout de même compter 18 mois pour retrouver la qualité de service“, conclut-elle.

C’est une politique ubuesque. L’attractivité à la PJJ est un vrai sujet depuis de longues années. La manière dont on traite les contractuels actuellement ne leur donnera pas envie de rester. Qui va accepter d’avoir été viré comme une malpropre et d’attendre un coup de fil dans trois mois pour revenir ?”, interroge, pour sa part, Aurélie Posadzki, de l’UEMO de Montreuil et représentante de la CGT.

Une analyse que la DPJJ prend à contrepied. Elle fait savoir que le schéma d’emploi de la PJJ a augmenté “de +337 équivalents temps plein nets” entre 2020 et 2023, “avec pour 2024 un schéma d’emploi de +92 ETP“. “La PJJ, qui compte, en moyenne nationale, un peu plus de 20 % de personnels contractuels, a connu depuis le début de l’année 2024, une accélération de ses recrutements, signe que les mesures prises pour renforcer l’attractivité de la PJJ, en réévaluant la rémunération des contractuels et des titulaires portent leurs fruits“, indique la direction. Mais, précise-t-elle, “cette accélération, qui conduit à un dépassement très mesuré sur une masse salariale de 490 millions d’euros, doit être conjuguée avec un pilotage fin et très maitrisé de sa masse salariale“. Aussi, le garde des Sceaux a-t-il demandé un état des lieux de la situation à fin juillet. Il a également confié une mission d’évaluation à l’Inspection générale de la Justice sur le pilotage des effectifs de contractuels et de la masse salariale en 2024 à la protection judiciaire de la jeunesse. Un rapport intermédiaire de cette mission sera remis au ministre le 30 août. La DPJJ assure qu’il “sera partagé avec les organisations syndicales, dans la poursuite du dialogue social.”

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