En images | Val-de-Marne | 17/05
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La biodiversité retrouvée des bords de la Marne : un joyau de nature à savoir observer

La biodiversité retrouvée des bords de la Marne : un joyau de nature à savoir observer © CD

Arbres exotiques, plantes comestibles, lianes, oiseaux migrateurs, petits poissons qui avaient disparu… La Marne, déjà en partie préservée de la période la plus industrielle de la banlieue parisienne, a retrouvé ses dernières années une biodiversité qui tendait à s’éroder. Un monde de nature à explorer. Explications avec Nathalie Lévy, spécialiste des visites nature, et rappel historique avec Vincent Villette, directeur du musée intercommunal de Nogent-sur-Marne.

À quelques mois des Jeux olympiques, la Seine est de nouveau perçue comme un espace de loisirs, et bientôt de baignade, une image festive que la Marne a su conserver grâce à ses quelques guinguettes encore en place, ses rives épargnées par la grosse industrie et ses îles nature. Par rapport au fleuve qu’elle rejoint à la confluence d’Alfortville – Charenton, la Marne aux abords de Paris a été historiquement mieux préservée.

Cet article s’inscrit dans le cadre d’une série d’articles sur la Marne, réalisés avec le soutien de Val-de-Marne Tourisme et Loisirs, qui propose des croisières thématiques sur la Marne durant toute la belle saison.
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Un peu d’industrie chimique

Penser que les bords de Marne sont restés vierges de toute industrie ne correspondrait toutefois pas à la réalité. “Il y a eu un peu d’industrie chimique à la fin du 19e siècle, notamment à Nogent-sur-Marne, dans la portion entre le pont de Nogent et le début de l’île de beauté. Celles-ci ont du reste été reconverties pour produire du gaz durant la guerre 14-18”, explique Vincent Villette, directeur du musée intercommunal de Nogent. À l’époque, pourtant, les guinguettes ne sont pas loin, mais “tout coexiste”, rappelle le directeur. “Sur certaines images, on voit des gens petit-déjeuner sur l’herbe, près du port, avec les murs des industries dans le fond.”

En comparaison avec les bords de Seine, où l’industrie a davantage chassé les guinguettes, la Marne est néanmoins restée beaucoup mieux préservée. “L’un des éléments, retient Vincent Villette, tient aussi aux règlements des lotissements des anciens domaines, qui excluent l’industrie.” Dès cette époque, les maires ont, en effet, la pression pour maîtriser l’urbanisme.

Pique-nique en bord de Marne, Belle Époque (avant 1914) Collection générale de cartes postales du Musée intercommunal de Nogent-sur-Marne

L’autre grand facteur de protection de la Marne est sa navigabilité moins pratique que la Seine. Sans être pour autant épargnée par la bétonisation de ses berges, rendues plus abruptes pour faciliter la circulation des bateaux, la Marne offre un gabarit plus limité.

Le canal qui a sauvé les îles

Surtout, certains aménagements ont contribué à préserver la rivière, comme le canal de Saint-Maur, achevé dès 1821. L’ouvrage, qui comprend une écluse et un tunnel de 600 mètres, relie directement Joinville-le-Pont à Maisons-Alfort et à la confluence avec la Seine. Il court-circuite ainsi toute la boucle qui entoure la ville de Saint-Maur-des-Fossés.

Lire : Le clapet du siècle posé dans l’écluse de Saint-Maur à Joinville

Ce canal, qui limite encore la taille des bateaux qui transitent, a permis d’éviter un aménagement drastique de la rivière au niveau de la boucle, en particulier de préserver les îles. Alors que la Seine, qui accueillait de nombreuses îles aux abords de Paris, en a perdu la majorité, supprimées pour ne pas gêner la navigation, cette boucle de la Marne a conservé les siennes. Ces îlots, d’un peu moins ou un peu plus d’un hectare, constituent un véritable joyau de biodiversité, désormais protégés et valorisés.

Bords de Marne côté Perreux. En face, l’île aux Loups

Renaturation

Malgré cette préservation, la Marne a subi une pollution croissante, de l’arrivée du chemin de fer jusqu’à la presque fin du 20e siècle. L’interdiction de la baignade, en 1970, en témoigne à la fois des conséquences, mais aussi d’une prise de conscience du problème. Dès 1964, une loi sur l’eau, à l’origine de la création des agences de l’eau par grand bassin fluvial, marque le changement de cap. Progressivement, les outils se développent pour protéger ce patrimoine naturel.

“Il y a beaucoup d’exemples de renaturation au Perreux-sur-Marne, Bry-sur-Marne, ou encore à Noisy-le-Grand, explique Nathalie Lévy, paysagiste et guide nature dans le Grand-Paris. Les berges ont été reprofilées pour être plus douces alors qu’elles avaient été rendues abruptes. Et sur les berges déjà adoucies, souvent à l’endroit des anciennes plages, des frayères (lieu de reproduction des poissons) ont pu être aménagées, comme au Perreux-sur-Marne par exemple. Il y a aussi une roselière qui accueille des roseaux, des massettes, des iris, et une diversité de plantes herbacées, où les oiseaux peuvent se reproduire.”

“Aujourd’hui, souligne la guide nature, le principal point noir qui reste est l’A4.”

© CD

Iles protégées

Les îles ont pour leur par été protégées, en particulier celles qui étaient restées non habitées ou équipéees. Dans la boucle de Saint-Maur, par exemple, les îles de Pissevinaigre, des Gords et de l’Abreuvoir, constituent une réserve départementale et ont fait l’objet d’un classement en Espace naturel sensible en 2013. Un travail de protection qui passe par une gestion forestière précautionneuse, la lutte contre les espèces invasives, contre les animaux exotiques envahissants comme les ragondins (originaires d’Amérique du Sud et introduits en France à la fin 19e pour leur fourrure) qui détruisent les berges, un aménagement qui freine l’érosion, et aussi une interdiction d’accès, même pour se balader. Sur l’île de l’Abreuvoir (entre Champigny et Saint-Maur), l’ancien square ouvert au public a ainsi fermé pour permettre la renaturation.

Bords de Marne côté Perreux. En face, l’île aux Loups

Le travail de préservation concerne aussi les îles habitées. Sur l’île aux loups (au niveau de Nogent et du Perreux), qui fait une belle superficie de 3,5 hectares, il est interdit de construire de nouvelles habitations et l’île fait l’objet d’une réserve naturelle volontaire.

Biodiversité

De quoi permettre de retrouver progressivement la richesse de la faune et de la flore des bords de rivière, entre la ripisylve des zones humides comprises entre le lit mineur et le lit majeur, puis les espèces plus forestières.

Office français de la biodiversité / Réalisation Matthieu Nivesse (d’après OIEau), 2018

“Les prairies humides ont beaucoup disparu mais sont très importantes car elles peuvent absorber l’eau ou la relâcher et jouent un rôle d’éponge”, insiste Nathalie Lévy. “Préservées dans les îles, on y trouve des plantes très spécifiques et devenues rares, comme la cuscute, une plante parasite, la cardamine, la salicaire…”, poursuit la guide.

© hans-hillewaert-wcc.
La Grande Cuscute (photo non prise en ords de Marne)

Les berges reprofilées de l’île de Pissevinaigre, ont permis “le développement de vasières et de formations d’hélophytes, c’est-à-dire de plantes qui se développent de préférence les pieds dans l’eau ou un substrat humide et la tête au soleil, comme certains joncs, carex ou le Roseau commun”, développe aussi le département du Val-de-Marne, propriétaire des îles de l’Espace naturel sensible. (Voir la fiche dédiée du département sur l’aménagement de l’île de Pissevinaigre)

Dans cette partie proche de la Marne, les îles accueillent des forêts alluviales peuplées de frênes, aulnes, saules, peupliers, ormes, érables. “Le frêne fait le lien vers une forêt plus stable, à bois dur.” Surles bords de Marne, on trouve aussi de l’orme lisse, “une espèce très intéressante car elle résiste à la graphiose de l’orme.”

C’est éaglement dans cette première partie, proche de l’eau, que l’on peut découvrir les lianes, comme le houblon ou le chanvre, plante qui a du reste donné son nom à l’une des villes qui bordent la rivière, Chennevières-sur-Marne.

Côté comestibles, menthe et guimauve poussent au bas des berges. On trouve comme ailleurs beaucoup d’orties. “En ce moment, il y a également beaucoup de groseilliers en sous-bois”, note la guide nature.

Oiseaux, libellules et chauve-souris

Les oiseaux ne sont pas en reste, entre les canards, les cormorans, les hérons, les cygnes, les martin-pêcheurs, les bergeronettes, ou encore, plus rares, les sternes Pierregarin qui font étape dans leur migration et ont besoin de bancs de sable pour se poser.

© wcc-jean-jacques-boujot
Sterne Pierregarin (photo non prise en ords de Marne)

Dans l’air, on peut aussi observer des libellules, notamment des odonates. “Il y a également beaucoup de chauves-souris.”

De plus en plus de poissons

Dans l’eau également la biodiversité est progressivement revenue, en raison de la diminution de la pollution. “Dans les années 1970, il ne restait plus que 4 espèces de poissons, aujourd’hui, il y en a 34”, indique Nathalie Lévy. En témoigne le panneau ci-dessous, installé en bord de Marne.

© CD

Symbole de l’eau plus pure, le chabot. “C’est un poisson tout petit qui ne vient que lorsque l’eau est propre car il ne peut pas flotter et est obligé de rester au fond de l’eau. Il lui faut à la fois du sable et des rochers.” Ce poisson mesure entre 12 et 15 cm et ne pèse qu’une douzaine de grammes.

© hans-hillewaert-wcc.
Le chabot (photo non prise en ords de Marne)

L’art d’observer en toute saison

Reste à savoir observer tout ce petit monde de la Marne. “Pour commencer, il vaut mieux être encadré, et, puis, on progresse par palier, ce n’est jamais immédiat”, prévient Nathalie Lévy. Bien-sûr, il y a les coups de chance. “L’an dernier, on a vu une sterne Pierregarin en vol stationnaire, en train de pêcher, juste au niveau du pont de Bry !” Il y a aussi les lieux plus propices : au-dessus de l’eau, dans un arbre creux, dans les roselières…

Dans les zones humides, on trouvera davantage de plantes médicinales, comme le saule, dont on peut faire des décoctions d’écorce pour faire la baisser la température (à condition de ne pas être allergique à l’aspirine), ou encore la reine des prés à faire en tisane, le frêne dont on boit les feuilles fermentées (la frênette) ou encore le sureau, mais attention, pas n’importe lequel. Il faut éviter le sureau hièble, ligneux. Le sureau en arbre est comestible à condition de faire cuire ses baies noires, lesquelles ont des propriétés antioxydantes.

Certains lieux concentrent par ailleurs des espèces particulières, parfois exotiques, en raison de l’implantation d’arbres ornementaux. Ainsi peut-on admirer des liquidambar ou copalme, à Maisons-Alfort, du côté de l’île du Moulin-Brûlé, des tulipiers à Champigny-sur-Marne, ou encore des cyprès chauves.

Pour observer, il convient aussi de privilégier des temps plus calmes, comme le petit matin à l’aube, voire le coucher du soleil. Il vaut mieux en revanche éviter le week-end.

“Il y a bien-sûr des saisons plus favorables. Au printemps, on peut profiter des iris, comme il y en a beaucoup vers Champigny. On peut également observer des aubépines, des cerisiers, de nombreuses floraisons. À l’automne, ce sont les petits fruits, tandis qu’en hiver, l’architecture des arbres ressort.”

© CD
Bords de Marne côté Perreux- Nogent

Pour en savoir plus, participez à la croisière à la découverte des paysages de la Marne

Profitez également des randonnées culturelles organisées lors de La Grande Aventure les 8 et 9 juin pour découvrir les bords de Marne

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