Santé | | 02/04
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Livry-Gargan : colère après la fermeture brutale du cabinet médical de la clinique Vauban

Livry-Gargan : colère après la fermeture brutale du cabinet médical de la clinique Vauban © CH

Plus de 300 patients consultent au cabinet du docteur Franck Atlan à la clinique Vauban à Livry-Gargan. Malgré un accord avec l’Agence régionale de santé (ARS) sur le maintien de son service, le médecin s’est vu interdire l’accès à la clinique, en liquidation judiciaire depuis juillet.

C’est triste, le docteur Atlan est un bon médecin. Ça fait quatre ans que je consulte chez lui. Mais c’est surtout le dernier du secteur. Ailleurs, il y en a qui viennent d’arriver, mais ils ne prennent pas de nouveaux patients“, souffle Christelle. Comme une vingtaine de patients, elle est venue ce mardi matin, avec sa fille, devant la clinique Vauban, lui apporter son soutien. “Grace à lui, on m’a détecté une maladie grave. Où veulent-ils qu’on aille?“, s’exclame une autre dame.

“Injonctions paradoxales”

Ce rassemblement s’est organisé “à l’emporte-pièce car on a eu l’information vendredi de l’interruption du service de soins non programmés“, explique Annie de l’union locale CGT.

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À l’initiative de ce service qui a remplacé les urgences de la clinique Vauban, le docteur Franck Atlan, médecin généraliste en poste depuis 14 ans, est le seul praticien à avoir maintenu une activité depuis la fermeture de l’établissement, propriété d’Orpea. Mais, jeudi dernier, il s’est vu signifier l’interdiction d’y rentrer à compter de ce mardi, par le liquidateur judiciaire. “J’ai un sentiment de profonde colère, de tristesse et de dégoût. Ma situation pourrait être celle que rencontrent d’autres praticiens sur le territoire. Je ne comprends pas tout, réagit-il. C’est bourré d’injonctions paradoxales : on dit que les patients doivent pouvoir se faire soigner et ce courrier arrive brutalement, qui me dit que je ne vais pas pouvoir faire mon métier“, regrette le médecin qui reçoit 300 patients chaque semaine.

Pour les patients, les élus et les syndicats, le courrier du liquidateur judiciaire reste incompréhensible.

Mon sang n’a fait qu’un tour“, fait savoir Jérôme Legavre, le député LFI-Nupes de la circonscription qui rappelle qu’il s’est rendu avec Pierre-Yves Martin, le maire DVD de Livry-Gargan, au ministère de la Santé le 14 décembre. “On a défendu d’une seule voix le dossier de la clinique Vauban. On ne peut pas nous expliquer que, d’un coté, tous les indicateurs sanitaires en Seine-Saint-Denis sont au rouge, que le taux de mortalité infantile est de 35% supérieur à la moyenne nationale et, de l’autre, qu’il faut se résoudre à tirer un trait sur la clinique Vauban.”

© CH
Le docteur Franck Atlan devant la clinique Vauban, le 2 avril 2024.

15 000 consultations par an

Suite à cette rencontre, une table-ronde a été organisée le 6 mars dernier à la mairie de Livry-Gargan. Autour de la table, les deux élus, l’Agence régionale de santé (ARS), le groupement hospitalier de territoire, le conseil de l’ordre des médecins, la CPTS (communauté professionnelle territoriale de santé qui regroupe les communes de Livry-Gargan, Coubron et des Pavillons-sous-Bois) et le département. “Tout le monde était d’accord sur deux choses : relancer l’offre de soins et travailler collectivement à la réouverture de cette clinique. En attendant, on foutait la paix au docteur Atlan“, fustige le parlementaire. “Lors de cette même table-ronde, il a été indiqué que les soins non programmés sont indispensables à la population. Je ne peux pas comprendre que l’on laisse faire. Si on traite ainsi le docteur Atlan, ça jette quand même un doute sur la nature de l’engagement qui a été pris le 6 mars. Les accords doivent être tenus. 15 000 patients à l’année. On ne parle pas d’une activité anecdotique“, poursuit-il.

Un site connu de tous

La rencontre du 6 mars a été organisée par l’ARS et non pas par la ville. Et il me semblait quand même qu’il y avait une volonté de faire perdurer l’activité du docteur Atlan“, ajoute Annick Monnier, maire-adjointe de Pierre-Yves Martin.Des locaux transitoires pourraient exister, mais il est évident que rester sur le lieux serait la meilleure solution.

De fait, le service de soins non programmés de Franck Atlan occupe un lieu stratégique. “Ce n’est pas tant la structure qui est importante, que sa localisation qui est connue de tous“, insiste le médecin, en désignant le service de radiologie, échographie, cardiologie attenant à la clinique Vauban.

En Seine-Saint-Denis, on a la fois un manque de médecin et une vraie difficulté à les garder. Le docteur Atlan a non seulement mis en place un service de soins non programmés, mais aussi un dispositif coordonné avec le même logiciel métiers que les autres praticiens du territoire. Les patients bénéficient donc d’un suivi, par exemple, au service de radiologie qui est très performant. Cela évite d’attendre 24 heures aux urgences pour avoir une radio. C’est très important lorsque l’on sait que des personnes seniors qui restent plus de 24 heures aux urgences perdent un an d’espérance de vie. Un des enjeux du maintien de ce service de soins est donc de rester à proximité de l’Ehpad“, explique Jeanne Marchand, la directrice de la CPTS.

Pour Jeanne Marchand, une des raisons de la fermeture du cabinet médical pourrait être d’ordre logistique. “Accueillir des patients dans une immense clinique où tous les services ont fermé, c’est limite sur un plan réglementaire“, pointe-t-elle.

Quoi qu’il en soit, tous attendent une clarification de la part de l’ARS. “J’irai jusqu’au bout pour faire valoir le droit à exercer ma profession, prévient Franck Atlan. Des liens se sont créés avec mes patients. Les Livriens bien sûr, mais aussi des patients qui viennent de l’Essonne, des Yvelines et du Val d’Oise. C’est un service de soins non programmés qui a été reconnu par l’ARS comme d’intérêt général.”

Contactée par 93 Citoyens, l’ARS Ile-de-France précise que “si l’offre de soins séquano-dionysienne a effectivement été touchée par la fermeture de la clinique Vauban, une baisse d’activité était constatée depuis plusieurs mois au sein de cette structure, qu’il s’agisse de la chirurgie, de la médecine ou des activités obstétriques.” Mais, elle rejette toute idée de baisse drastique de l’offre de soins. “Grâce à l’accompagnement des services de l’Agence, les usagers concernés ont tous pu être réorientés et ont pu majoritairement bénéficier d’une offre de soins de proximité au regard de l’environnement hospitalier public/privé au sein du département“, détaille-t-elle. L’ARS confirme, en revanche, que lors de la réunion du 6 mars, “les différents acteurs impliqués ont convenu qu’il était nécessaire de travailler collectivement à un projet permettant de maintenir, voire développer, des consultations avancées de spécialistes et des soins non programmés, et de proposer également des prises en charge et accompagnements médico-sociaux pour mieux répondre aux besoins de la population.” Elle ajoute que “des travaux techniques plus approfondis seront menés (…) entre les participants à la table-ronde, sous la coordination de l’ARS Île-de-France, au regard des différentes pistes évoquées.” Travaux qui doivent être entrepris fin avril.

Pour sa part, le groupe Orpea rappelle qu’il “ne gère ni l’activité de soins qui était exercée par la société Vauban Santé (autorisations retirées par l’ARS), ni l’activité de soins que poursuit le Dr Atlan.” “Le refus d’accès au site est une décision des liquidateurs qui en sont toujours gardiens, puisqu’ils ne nous l’ont pas encore restitué alors même qu’ils ont pris la décision de résilier le bail qui nous liait à la société Vauban Santé ainsi que l’ensemble des contrats en cours (en ce compris les contrats liant les médecins rattachés à la clinique Vauban), ajoute-t-il.

Article mis à jour le 2 avril à 17:03 suite aux réactions de l’ARS Ile-de-France et du groupe Orpea aux sollicitations de 93 Citoyens.

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