Qu’il soit crémeux ou liquide, doux ou corsé… Le miel made in Ile-de-France a de plus en plus d’adeptes, propulsé par plus de 3 000 apiculteurs. Des parcs aux toits d’immeuble, les ruches se nichent partout, entretenues avec passion.
“Ça fait toujours plaisir de recevoir un prix, ça récompense le travail accompli“, confie Stéphane Dupont, qui a remporté une médaille d’or lors du dernier concours des miels d’Ile-de-France, catégorie “miel liquide toutes fleurs, récolté en été”. En 2019 déjà, il avait décroché l’argent.
D’un miel à l’autre, c’est un univers de nuances, dans l’aspect comme le goût, que le jury apprécie. Sur 392 échantillons présentés début novembre, la Société centrale d’apiculture a primé pas moins de 118 miels en Ile-de-France
Une reconversion après la retraite
Si l’aventure de Stéphane Dupont a commencé dans son jardin, elle a pris plus d’ampleur lorsqu’il a installé ses ruches dans le parc du Sausset, avec l’accord du conseil départemental dont il était salarié. Aujourd’hui à la retraite, cet ancien technicien de la direction de l’innovation numérique et des systèmes d’information (DINSI) s’est ensuite tourné vers la mairie d’Aulnay-sous-Bois. En 2014, il a signé avec la ville une convention qui lui permet d’exploiter ses ruches au centre municipal technique. C’est là aussi qu’il récupère le miel de ses abeilles. “On enlève au couteau l’opercule de cire qui protège le miel sur les cadres. On place ensuite les cadres dans la centrifuge, ce qui vide les alvéoles. On filtre ensuite le miel pour enlever les impuretés et on le met dans un maturateur pendant 8 ou 10 jours“, décrit-il.
Les huit ruches de Stéphane Dupont hébergent jusqu’à 80 000 insectes à la pleine saison. “J’ai commencé en 1979, après une formation au jardin du Luxembourg [ndlr, à Paris] et je ne me suis jamais arrêté. J’ai toujours eu des ruches depuis“, se souvient l’apiculteur. “Il y a un côté un écolo avant l’heure, estime-t-il. Pour être apiculteur, il faut être attentif au rythme de la nature. Les abeilles sont des animaux qui participent à tout un écosystème de vie comme tous les pollinisateurs.“
Le secret de Stéphane Dupont : beaucoup d’attention et un savant équilibre dans la gestion de son cheptel d’abeilles, explique-t-il. “Il faut constamment surveiller ses ruches pour qu’elles restent en bonne santé“, prévient-il. Car les abeilles franciliennes sont particulièrement fragiles.
Trop de ruches ?
L’Ile-de-France est, en effet, la région qui affiche le taux de pertes hivernales (indicateur qui inclut les colonies mortes, faibles ou accidentées) le plus élevé du pays, derrière les Hauts-de-France. 28,9% des abeilles meurent en hiver, soit près d’une sur trois, selon la dernière enquête datée de 2023 de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Une mortalité due à plusieurs facteurs comme la faiblesse des colonies à l’hivernage, le frelon asiatique ou encore le parasite Varroa. Le réchauffement climatique et la pollution inquiètent aussi l’apiculteur.
L’engouement pour l’apiculture, qui a multiplié les ruches, commence aussi à être questionné. Certes, la région ne comptait que 3 559 apiculteurs en Ile-de-France en 2021, soit 5% du nombre d’apiculteurs déclarés auprès de la direction générale de l’alimentation à l’échelle nationale, d’après les données de la dernière étude de l’Observatoire de la production de miel et gelée royale. Mais, en termes de densité, la région Ile-de-France bat tous les records “avec 2,4 apiculteurs pour 1 000 hectares (moyenne nationale : 0,9), notait le ministère de l’agriculture dans une note de conjoncture en 2020. L’Ile-de-France arrive en 4ème position pour la France métropolitaine, avec 27 ruches pour 1 000 ha.”
Or, “cet engouement peut amener à une saturation du paysage urbain en ruches. Les abeilles domestiques doivent visiter plus de 5 millions de fleurs pour produire 1 kg de miel, et une ruche produit environ 20 kg de miel“, pointe dans une étude, l’Institut Paris Région. Un nombre trop élevé de ruches génère aussi une compétition entre les abeilles et les autres insectes pollinisateurs.
Selon les estimations de la Fédération nationale du réseau de développement apicole, l’Ile-de-France représente moins de 4% de la production nationale (1 150 tonnes en 2023), mais la production y est en forte reprise (+39%) après la chute vertigineuse constatée dans tout le pays entre 2020 et 2021.
La production de Stéphane Dupont atteint, quant à elle, 120 à 150 kilos en fonction des années. L’essentiel est vendu durant la fête de l’arbre qui se tient à la mi-octobre au parc de Dumont à Aulnay-sous-Bois. “Je n’ai pas besoin de produire plus, ça reste avant tout une passion“.
Voir tous les lauréats du concours des miels franciliens 2023
Miels primés par département d’Ile-de-France
Département | Nombre de miels primés |
Val-de-Marne | 28 |
Hauts-de-Seine | 17 |
Val-d’Oise | 16 |
Seine-et-Marne | 15 |
Essonne | 15 |
Seine-Saint-Denis | 10 |
Paris | 9 |
Yvelines | 8 |
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