Recruter sans CV, via une appli mobile qui propose une vingtaine de questions de personnalité, tel est le défi relevé par l’association de directions de ressources humaines AIRH, impulsée par Aéroports de Paris (ADP). Fait notable, 70% des embauchées via ce canal étaient demandeurs d’emploi, et 7% étaient bénéficiaires du RSA. Explications avec Arnaud Pouilly, directeur du développement économique et de l’emploi chez ADP.
120 000 personnes travaillent sur les sites d’Aéroports de Paris (ADP), dont 25 000 à l’aéroport d’Orly et 90 000 Roissy. Des emplois variés, qui vont de la sécurité à l’accueil, en passant par le nettoyage, l’administration, la logistique… Autant d’emplois qui dépendent des nombreuses entreprises qui font tourner l’aéroport. “ADP ne pèse que 4% de ces emplois”, souligne Arnaud Pouilly, directeur du développement économique et de l’emploi chez ADP, invité à une table ronde à la CCI du Val-de-Marne lors de la soirée sur l’attractivité économique du département, mercredi 20 mars. En tant qu’hôte, l’aéroport joue les ensembliers. “Nous sommes un petit employeur, mais un intégrateur de services”, précise le directeur.
Pour postuler : voir l’application Aerowork
Jouer groupé pour recruter d’une seule voix
Dans le contexte de forte tension sur les recrutements, l’opérateur aéroportuaire a cofondé une association de directions de ressources humaines, AIRH, avec d’autres entreprises qui interviennent à Roissy et Orly, à l’instar d’Aviapartner, Groupe Europe Handling (logistique, maintenance), Securitas, Seris (sûreté), GSF, Atalian (propreté), City One (accueil et service), Aeria… “L’association compte aujourd’hui 13 groupes qui pèsent 30 000 emplois”, détaille Arnaud Pouilly.
En réfléchissant sur la manière de collaborer pour mieux recruter, les DRH sont parvenus à un constat. “Les modes de recrutement actuels ne permettent pas de recruter comme on veut. On se concurrence sur le même sourcing”, indique Arnaud Bailly. Autre conclusion : “nous avons besoin de porter le même discours sur l’aéroport”, poursuit le directeur du développement économique et emploi d’ADP.
Plutôt sniper ou ninja ?
Décidés à jouer groupé, les DRH ont donc imaginé une plate-forme commune pour attirer les candidats. Mais, pas n’importe quelle plateforme. Pas un énième site internet présentant une kyrielle de postes auxquels postuler en envoyant son CV. S’affranchissant de ce cérémonial RH, l’association a pensé d’abord à sa cible, la plus large possible, avec les codes de communication d’aujourd’hui. Ainsi est née l’application Aerowork, développée par Dynatos design. Celle-ci ne propose pas des postes en particulier mais invite à “embarquer” pour travailler à l’aéroport. Pas de CV ni lettre de motivation à déposer mais un questionnaire de 20 questions qui proposent à chaque fois deux types de réponse, pour établir rapidement un premier profil. En bref, les questions permettent de jauger si le candidat est plutôt dans l’empathie ou la rigueur, l’esprit d’initiative ou le suivi des règles. Exemple de questions : je suis les recettes ou j’improvise, plutôt capitaine ou buteur ? Dans un jeu de guerre, plutôt sniper ou ninja ?
Une appli mobile simple et sans CV
Une fois le questionnaire répondu, l’appli identifie les qualités pour réussir dans un des métiers aéroportuaires : pro-activité, sang-froid, prévenance… Le candidat précise ensuite son profil, indiquant où il habite, s’il a ou non le permis, comment il se déplace, s’il est ou non demandeur d’emploi, bénéficiaire du RSA, quel est son âge. Au terme de l’enquête en ligne, de quelques minutes, plusieurs métiers sont proposés, précisant s’il y a ou non des postes à pourvoir en ce moment. Si cela est le cas, une interface propose de postuler, avec quelques questions supplémentaires pour identifier un éventuel besoin de formation complémentaire, toujours sans demander ni CV ni lettre. Il est possible de déposer plusieurs candidatures à plusieurs métiers. L’équipe de DRH s’engage à répondre au candidat dans les 72 heures, soit pour lui proposer de poursuivre la procédure de recrutement, soit pour lui notifier un refus, en le motivant, et en proposant un accompagnement.
Lancée en septembre 2022, l’application a été promue grâce à quelques influenceurs sur les réseaux sociaux comme TikTok. Les missions locales se sont aussi emparées de l’outil, le proposant largement à leurs jeunes. Le succès a été au rendez-vous. “Déjà 25 000 candidatures ont été déposées”, chiffre Arnaud Pouilly qui considère que cette application constitue également un outil d’insertion des populations, rappelant que 70% des recrutés étaient demandeurs d’emploi et 7% au RSA. “Nous faisons faire des économies de RSA !”, pointe le directeur.
Ce mercredi 20 mars, la présentation du représentant d’ADP a visiblement intéressé parmi les entrepreneurs, certains lui demandant s’il était possible de répliquer cet outil à d’autres secteurs d’activité.
L’important n’est pas seulement l’outil
“Bien sûr que l’outil est réplicable, mais attention à ne pas se focaliser que sur l’outil. Dans notre cas, ce qui a été essentiel est la volonté commune d’arrêter de se faire de la concurrence entre DRH”, insiste Arnaud Pouilly. Ce qui n’empêche pas à chaque entreprise de retrouver sa marque employeur dans la seconde phase du processus de recrutement, lorsque les candidatures ont été envoyées.
Pour en savoir plus :
Voir le site de l’association AIRH
Pour postuler :
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