Justice | | 13/01
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Procès de l’affaire Théo: les séquelles irréversibles de la victime

Procès de l’affaire Théo: les séquelles irréversibles de la victime © Freepik

Toute sa vie, Théo souffrira d‘”incontinence”, ont révélé vendredi des experts médicaux devant la cour d’assises de Seine-Saint-Denis, où sont jugés trois policiers pour l’interpellation violente en 2017, lors d’un simple contrôle d’identité. Le jeune homme avait alors été blessé à l’anus par un coup de matraque télescopique.

Lorsque Théo, 29 ans, est interpellé le 2 février 2017 à Aulnay-sous-Bois, il reçoit un “coup d’estoc”, plus précisément un coup avec la pointe du bâton télescopique de défense (BTD) du gardien de la paix Marc-Antoine Castelain, à travers son caleçon.

La douleur est si intense que le jeune homme athlétique s’effondre. Le coup provoque une rupture de son sphincter (muscle annulaire) avec une plaie de dix centimètres de profondeur.

Il se fait opérer une première fois en urgence et vit avec “une poche de stomie”, de selles, explique une gastroentérologue et proctologue qui a rencontré trois fois la victime.

En mai 2018, Théo va subir une deuxième opération chirurgicale pour rétablir son transit.

Cette nouvelle intervention va malheureusement “empirer” son état avec “des douleurs, suintements, saignements”, détaille la spécialiste en visioconférence. Il “n’y a pas vraiment de prise en charge proctologique”, regrette-t-elle.

Avec un autre expert, la professeure va rencontrer une dernière fois Théo en juin 2023 et observe “une amélioration de l’incontinence fécale”, “pas de douleurs anales”. Son anus a “bien cicatrisé”.
Néanmoins, le jeune homme “n’a pas voulu faire la rééducation”, “considère que rien n’est possible pour lui, que sa situation est définitive”, ce qu’objectent les différents médecins qui l’examinent.

“Dépression”

Une psychologue pense qu’il “a un syndrome post-traumatique”. Théo “reste enfermé chez lui, c’est un ami qui lui fait ses courses”, révèle-t-elle.

Ancien footballeur en Belgique, il “a pris dix kilos” et tombe dans “une dépression”. Il vit d’une allocation aux adultes handicapés de 900 euros.

La question du “préjudice permanent” a retenu vendredi l’attention de la cour d’assises qui a vu défiler des gastro-gastroentérologues, proctologues et autres experts.

L’un d’eux estime que la grave blessure de la victime n’a pas pour conséquence “une infirmité permanente” mais “une séquelle”. “Au prix d’un lourd investissement, il est possible d’une amélioration dans le temps mais peu de chance de disparition” de son incontinence, analyse a contrario un autre.
Un troisième assure que “cela va être compliqué d’améliorer les fuites”. Il va être “gêné au quotidien”, “compliqué dans la vie intime”.

Sept ans après sa prise en charge médicale, son incontinence est “toujours présente”, note un autre spécialiste.

Si Théo respecte un strict suivi médical et psychologique, “on va pouvoir améliorer entre 60 et 80%” de son état de santé mais il ne recouvrira pas “le tonus du sphincter anal”.

Et c’est parce que la victime garde ces séquelles irréversibles de son interpellation violente que le fonctionnaire de police auteur du coup de matraque est poursuivi devant une cour d’assises, fait rare dans des affaires de violences policières, principalement jugées en correctionnelle.

Le policier risque jusqu’à quinze ans de prison.
Le procès reprendra lundi avec l’audition de Théo.
Le verdict est attendu le 19 janvier.

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