Justice | | 11/01
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Procès de l’affaire Théo, mutilé à vie après un contrôle policier : l’analyse de l’IGPN

Procès de l’affaire Théo, mutilé à vie après un contrôle policier : l’analyse de l’IGPN

Un visage tuméfié, des vêtements ensanglantés et une victime allongée à même le sol du commissariat : l’enquête de la “police des polices” (IGPN) sur l’interpellation de Théo s’est trouvée au cœur des débats, mercredi, à Bobigny où sont jugés trois policiers.

Le 2 février 2017, le jour même de l’interpellation peu avant 17H00 du jeune homme à Aulnay-sous-Bois, “la hiérarchie du commissariat se rend rapidement compte de la gravité des faits”, a assuré le directeur d’enquête de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) au deuxième jour du procès, devant les assises de la Seine-Saint-Denis.

Suite à une saisine du parquet de Bobigny, ses équipes sont dépêchées ce jour-là au commissariat d’Aulnay-sous-Bois, à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Paris, quelques heures après que Théo a été hospitalisé. Le jeune homme va alors subir une opération en urgence pour traiter une perforation rectale : il a reçu un coup avec la pointe d’un bâton télescopique de défense (BTD) à travers son caleçon lors de son interpellation.

Presque sept ans après les faits, Théodore, 29 ans, est porteur d’un handicap à vie. Le coup avait été porté par un gardien de la paix aujourd’hui âgé de 34 ans, Marc-Antoine Castelain. Poursuivi pour des violences volontaires ayant entraîné “une infirmité permanente” sur la victime, le policier risque quinze ans de prison.

À la barre, le commandant en charge de piloter l’enquête IGPN vient décortiquer les images de vidéosurveillance et les photos prises sur le lieu de l’interpellation. Elles laissent peu de doute sur le “geste d’estoc”, “un point de compression” qui va faire “raidir” M. Luhaka, qui “n’oppose plus aucune résistance”, détaille le fonctionnaire de police, aujourd’hui à la retraite.

L’enquête administrative de l’IGPN a conclu à “un usage disproportionné de la force et à un manquement au devoir de protection due aux personnes placées sous la garde de la police”. Dans son rapport, la “police des polices” a aussi établi que “les deux violents coups d’estoc du BTD” ont été portés à un moment où “Théo (…) ne commet pas d’atteinte envers l’intégrité physique des policiers interpellateurs”.

Lorsque Théo est placé en garde à vue, il a le visage tuméfié, les yeux mis clos, le T-shirt couvert de sang et se retrouve allongé sur le sol en carrelage

À la barre, les enquêteurs de l’IGPN mesurent toutefois leurs propos. Les accusés sont qualifiés “de très bons professionnels”, “sans antécédent”. Une inspectrice de l’IGPN assure, au sujet du violent coup de matraque à l’anus, que, “même si les conséquences de ce geste sont aussi dramatiques”, cela n’empêche pas que la technique utilisée est “tout à fait légitime”. Il s’agit du “geste le moins dangereux” dans l’usage de la force avec un bâton télescopique de défense, dit-elle.

Dans la voiture qui a servi à transporter la victime au commissariat, du sang est retrouvé en abondance sur la plage arrière, la portière et une vitre, sans que les policiers ne se rendent comptent “de la gravité des blessures”. Lorsque Théo est placé en garde à vue, il a le visage tuméfié, les yeux mis clos, le T-shirt couvert de sang et se retrouve allongé sur le sol en carrelage, d’après un cliché retrouvé sur le portable d’un des policiers.

À son arrivé au commissariat, le policier qui a porté le coup de matraque assure que la victime “a glissé sur le bâton”. “Une rumeur”, qui se propage parmi ses collègues… – “Ce n’est pas renverser les choses ?”, demande l’avocat général. – “Si, je pense”, répond le directeur de l’enquête.

Le procès se poursuivra jeudi avec des témoins.

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