Alors que l’État a récemment renoncé à prolonger le couvre-feu d’une demi-heure à l’aéroport d’Orly, privilégiant d’autres solutions pour réduire le bruit la nuit, l’Agence régionale de santé estime que le compte n’y est pas.
Pour rappel du contexte, l’État avait lancé une étude d’impact pour réduire le bruit de six décibels, entre 22h et 6 h du matin, autour de l’aéroport, pour respecter les normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L’étude menée par CGX Aero, cabinet spécialiste des traitements de données aéronautiques, proposait trois scénarios dont deux auraient modifié les horaires de couvre-feu, lequel ne commence actuellement qu’à 23h30 et s’arrête à 6 heures.
Les trois scénarios qui étaient proposés
Scénario A : maintien du couvre-feu actuel et interdiction des vols les plus bruyants à partir de 22 h
Scénario B : interdiction des vols les plus bruyants à partir de 22 h et interdiction des décollages à partir de 23 h
Scénario C : extension du couvre-feu de 23 h jusqu’à 6 h et interdiction des vols les plus bruyants à partir de 22 h.
Alors que les riverains et leurs élus plaidaient pour prolonger le couvre-feu, l’État a retenu la seule solution permettant de s’affranchir totalement de cette option, interdisant simplement, de manière progressive, les vols les plus bruyants.
Lire : Bruit lié à l’aéroport d’Orly : l’État renonce à prolonger le couvre-feu, même d’une demi-heure
Pour acter sa décision, l’État a pris un arrêté, soumis à consultation. C’est dans le cadre de cette consultation que le Conseil national du bruit a sollicité l’avis de l’Agence régionale de santé (ARS). Dans une note de quatre pages, l’ARS constate que l’État a retenu le scénario “le moins restrictif”. Elle considère que “l’approche méthodologique retenue (par l’étude d’impact) sous-estime les impacts sanitaires réels”.
Une étude d’impact calculée sur les normes les moins disantes
L’évaluation des impacts acoustiques et sanitaires des mesures de restriction calculée par CGX Aero se base, effet, sur la valeur limite réglementaire pour le niveau de bruit aérien nocturne (Ln), soit 50 dB(A) et non sur la valeur recommandée par l’OMS qui est elle de 40 dB (A) pour le Ln. “Les impacts sanitaires apparaissent donc globalement sous-évalués par l’EIAE (Ndlr, l’édtude d’impact). Malgré le couvre-feu actuel entre 23h30 et 6h00, plus de 274 000 personnes sont encore exposées à des niveaux qui dépassent la recommandation de l’OMS (40 dBA Ln), contre 57 000 en dépassement de la valeur limite réglementaire (50 dB(A)) et 45 000 souffriraient de fortes perturbations de sommeil (source : Bruitparif, 2023) là où l’AIEA en dénombre moins de 14 000“, constate l’ARS.
8 heures de sommeil en continu : un objectif de santé publique qui ne peut pas être atteint sans augmentation du couvre-feu
L’agence rappelle que “la recommandation de 8 heures de sommeil en continu peut être considéré comme un objectif de santé publique, qui ne peut être atteint pour les riverains des aéroports sans la perspective d’une extension à terme du couvre-feu. C’est une demande récurrente des collectifs de riverains d’aéroports.”
Pour l’ARS, l’étude n’envisage pas les coûts socio-économiques de manière globale, retenant “uniquement le manque à gagner à supporter par le secteur aéronautique”.
L’agence invite par ailleurs à être vigilant sur les enjeux d’équité territoriale, invitant à une harmonisation des mesures de protection entre les différents aéroports franciliens, notant que l’étude d’impact de Roissy-Charles de Gaulle n’a pas encore été produite.
En conclusion, l’agence considère que l’Etat a retenu le scénario le moins protecteur à partir d’une étude d’impact déjà calculée sur la base de seuils n’étant pas les plus protecteurs, et recommande d’aller plus loin.
Gérard Larcher prend position
En complément des élus et parlementaires locaux ayant déjà pris position en faveur du prolongement d’une demi-heure du couvre-feu, le président du Sénat, Gérard Larcher (LR), a également écrit au ministre des Transports, Patrice Vergriete, pour plaider en ce sens. “C’est le deuxième personnage de l’État, nous espérons que cela va peser”, réagit Didier Gonzales, maire de Villeneuve-le-Roi, qui bataille depuis des années pour le prolongement du couvre-feu et une limitation plus stricte des atterrissages et des décollages.
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