Recruter par l’intermédiaire du sport en oubliant l’espace d’un instant le sacrosaint CV, tel est l’objectif du dispositif “Du stade vers l’emploi”. Ce jeudi 29 février, c’est à Bonneuil-sur-Marne, au gymnase Aimé et Eugénie Cotton, que 140 personnes ont participé à ces “job dating sportif”. Reportage.
“L’écoute, le respect, la force de proposition, la rigueur, la solidarité, l’esprit d’équipe… Le sport permet de valoriser ces valeurs“, motive Romain Lucet, directeur adjoint de France Travail (ex Pôle Emploi) Créteil-Bonneuil, dans le brouhaha du gymnase. C’est toute l’originalité du dispositif Du Stade Vers l’Emploi. Pour une fois, on oublie le CV, d’ordinaire préalable à tout échange entre un recruteur et un candidat. Exit donc les diplômes et l’expérience professionnelle, ce qui compte ici est le comportement de chacun dans l’instant présent.
“Aujourd’hui, il y a 140 participants, dont 10 entreprises, c’est plutôt un succès, se réjouit-il. En général, on a un objectif de 120 candidats.” Ces rendez-vous, qui mettent en lien des recruteurs et des demandeurs d’emploi, associent à chaque fois une fédération sportive. Après la fédération de handball en novembre, c’est ainsi la ligue d’Île-de-France d’athlétisme qui était partenaire ce jeudi.
Pour les employeurs, il s’agit d’élargir le spectre des candidats potentiels pour recruter dans des métiers en tension comme ceux de la sécurité, du transport ou encore de la logistique. “Les recherches de demandeurs d’emploi se font en lien avec les offres proposées par les entreprises… l’objectif, c’est aussi que les profils et les offres correspondent”, précise néanmoins Romain Lucet.
Le dispositif, lancé en 2018 dans les Hauts-de-France, a pris une dimension nationale en 2022, porté par le e Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, le Ministère du travail et l’Agence Nationale du Sport. L’organisation est bien rodée, avec une première partie dédiée aux rencontres sportives, suivie d’un repas et d’une séquence de job dating.
“La barrière employeur – demandeur d’emploi n’existe plus”
Ce jeudi matin à Bonneuil, dix équipes se confrontent ainsi dans des ateliers d’athlétisme. “On est dans la même équipe, tout le monde se mélange et ça facilite beaucoup plus le contact. Il y a un esprit d’équipe qui s’établit au fur et à mesure. La barrière employeur demandeur d’emploi n’existe plus”, confie Bryan, employeur chez Gips security.
Miranda qui est à la recherche d’un emploi depuis peu, confirme : “faire du sport devant plusieurs personnes, je n’étais pas trop pour… mais au final, c’est vraiment top. Ça permet de se libérer, d’être soi-même et de casser les barrières”.
Après les échauffements menés par les coachs de la fédération française d’athlétisme, la timidité des premières minutes laisse vite la place aux applaudissements et aux encouragements sonores. Des liens se forgent entre équipiers. Et on en oublierait presque pourquoi on est venu.
“Ça change vraiment des entretiens d’embauche habituels… D’ailleurs, je n’ai même pas l’impression d’être en entretien. Je m’entends très bien avec mon équipe”, témoigne Rebecca, invitée une semaine plus tôt par son conseiller France travail. Ilyes, tout juste 20 ans, ne perd pas l’objectif de vue : ”Je fais les exercices à fond, j’encourage les autres, je suis concentré.”
L’objectif se concrétise un peu plus tard dans la journée, après le repas qui permet d’échanger tout en restant dans l’informel. Débute alors la séquence job dating.
Certains candidats ont attiré l’œil des employeurs sans même le savoir. “Il y a plusieurs personnalités qui se dégagent : des chefs d’équipe comme des gens plus introvertis, mais qui sont à fond”, a repéré Samy, employeur chez l’entreprise Dérichebourg. “Dans mon équipe, il y a une dame qui avait mal au pied. Pourtant, elle a serré les dents et elle a fait toutes les activités. C’est des personnes comme ça qu’on cherche, des gens qui se donnent et qui ne lâchent pas”, explique Christel, responsable RH chez Norauto, prête à revenir à la prochaine édition. Dans le secteur de Bonneuil-Créteil, celle-ci se tiendra en avril, en partenariat avec la fédération française de tennis de table.
53% de retour à l’emploi
Le bilan de ces opérations est encourageant. En 2023, 328 opérations se sont déroulées en France, qui ont fait participer quelque 22 000 demandeurs d’emploi et 3 700 structures en recrutement. Au niveau national, le taux d’accès à l’emploi lié à ces opérations est de 53% à six mois.
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