5000 espèces d’orchidées différentes, tel est le conservatoire floral composé depuis cinq générations par les serres Vacherot & Lecoufle, à Boissy-Saint-Léger. L’entreprise, désormais dirigée par l’arrière-arrière-petite fille du fondateur, continue de tracer sa route, en réinventant son modèle économique. Rencontre avec Colombe Lecoufle.
L’aventure des orchidées Vacherot &Lecoufle commence en 1886. À l’époque, Henri Vacherot est horticulteur, spécialiste des œillets. C’est lors d’une crue, quand un collectionneur d’orchidées, habitant de Villeneuve-Saint-Georges, lui confie sa collection pour la sauver des eaux, qu’Henri Vacherot découvre leur diversité, et commence à se passionner pour ces plantes complexes et délicates.
Pour se consacrer entièrement à ces plantes exotiques, il s’associe en 1913 à son gendre, Maurice- Etienne Lecoufle, sorti major de l’école d’horticulture de Versailles. “À cette époque, il s’agissait de comprendre les besoins des orchidées en fonction de leur origine, des variations de température, de sécheresse, et comment hybrider, explique Colombe Lecoufle, descendante des fondateurs et actuelle dirigeante des serres. Tout cela s’est fait au fur et à mesure des années.” Dès le départ, les serres sont situées dans leur lieu actuel, sur le territoire de Limeil-Brévannes mais avec une adresse à Boissy-Saint-Léger.
Cet article s’inscrit dans le cadre d’une série de portraits d’entreprise ambassadeurs du Fabriqué en Val-de-Marne réalisés avec le soutien de la Chambre de commerce et d’industrie, à l’initiative de ce programme. Plus d’informations
Alors que Maurice-Etienne meurt dès le début de la Première Guerre mondiale, c’est sa femme, Henriette, qui poursuit l’ouvrage, avec ses parents et son beau-frère, Maurice Vacherot. Puis ses enfants, Marcel et Maurice Lecoufle continuent l’aventure. Les recherches se poursuivent pour créer de nouvelles plantes hybridées. “À l’époque, les orchidées se vendaient en fleurs coupées”, indique Colombe Lecoufle. La génération suivante continue d’innover en développant le clonage des orchidées à grande échelle, sous l’égide de Michel Vacherot (fils de Maurice Vacherot). Dans les années 1960, Boissy devient ainsi la “capitale de l’orchidée”.
Au seuil des années 1980, c’est Philippe Lecoufle (le fils de Maurice Lecoufle) qui reprend l’entreprise, après avoir fait le tour du monde pour observer sur le terrain. Ce dernier se passionne notamment pour la scénarisation des fleurs, participant à des concours internationaux avec des décors magistraux, aux Floralies, en France, mais, aussi, au Chelsea Flower Show ou encore au Hampton Court Palace Flower Show en Angleterre, où les serres Vacherot & Lecoufle remportent le premier prix à plusieurs reprises durant les années 2010. “On a eu la chance de gagner le Best in show pendant trois ans de suite à Hampton Court. C’était assez incroyable. C’était magnifique”, se souvient Colombe Lecoufle. De quoi transmettre la passion à la dernière génération.
La nouvelle dirigeante, l’une des trois filles de Philippe Lecoufle, a toutefois pris des chemins détournés pour revenir aux orchidées. “J’ai un parcours qui n’a rien à voir avec la botanique ou les plantes”, confie-t-elle. Une formation qui passe d’abord par les arts graphiques et l’école Estienne pour travailler dans la fabrication de livres, son premier métier. “Ensuite, j’ai compris que d’être derrière un bureau, ça ne me convenait pas”. Après avoir expérimenté le maraîchage, Colombe Lecoufle commence par mettre un pied dans l’entreprise familiale, jusqu’à en reprendre les rênes en 2017. C’est à elle qu’il revient désormais de relever un double défi : patrimonial et entrepreneurial.
Un conservatoire à préserver
Patrimonial, car il s’agit de conserver les 5 000 espèces d’orchidées, dont une partie se trouve dans des serres qui datent de 1900. Maintenir ce patrimoine végétal vivant constitue en soi un vrai défi. “On est un conservatoire”, insiste Colombe Lecoufle qui souhaite développer la mise en valeur de ces collections uniques. D’ores et déjà, l’entreprise propose régulièrement des visites et des portes ouvertes, ainsi que des cours.
Pour faire vivre cette incroyable collection, l’entreprise doit toutefois composer avec un bâti historique complexe à conserver. À côté de la grande serre où sont accueillis les clients, et qui a remplacé quatre plus petites il y a une vingtaine d’années, de plus petites, très anciennes, abritent la majorité des espèces. “On a des serres qui datent de 1900, dans des structures bois qui n’existent plus du tout aujourd’hui. C’est un challenge de réussir à les maintenir sur pied ou de trouver la solution pour les moderniser, ou carrément de tout changer”, témoigne l’entrepreneure. Un besoin de modernisation d’autant plus important que les serres ont besoin d’être chauffées.
Pour les serres, la question de l’énergie a toujours été cruciale. Pendant la guerre, l’entreprise, reconnue d’intérêt national, avait ainsi bénéficié de rations complémentaires de charbon. “On ne chauffe pas toute l’année, mais en hiver, on doit maintenir une température minimum dans les serres. Et c’est un très, très gros challenge, de trouver la meilleure énergie et que ce ne soit pas un gouffre financier.”
Au-delà de l’isolation, compliquée à mettre en œuvre avec des constructions historiques de 1900, les serres expérimentent aussi une légère diminution de la température pour réduire la consommation d’énergie.
Vente en ligne et location
Sur le plan commercial, Colombe Lecoufle a entrepris de diversifier les canaux. Le magasin, ouvert toute l’année, reste la base, mais les serres ont aussi développé la vente en ligne, qui représente aujourd’hui 20% du chiffre d’affaires.
La nouvelle dirigeante a aussi développé la location, depuis cinq ans. “On installe les plantes dans les bureaux ou dans les restaurants, pour que ce soit beau, et on passe les entretenir régulièrement. Lorsqu’une plante a besoin d’être changée, on la retire et on la remet en culture. On les reprend également pendant les périodes de fermeture.” Une diversification qui a permis de développer le BtoB et de contribuer à un chiffre d’affaires plus stable, moins saisonnier.
Les serres Vacherot & Lecoufle en chiffres
Date de création : 1886
Chiffre d’affaires : 500 000 euros
Effectif : 6 salariés
Références : 5 000 espèces d’orchidées différentes
Garder son positionnement : un défi
Au-delà des stratégies commerciales, le défi essentiel de l’entreprise, pourtant pionnière du clonage à grande échelle, a été de conserver son positionnement alors que certains pays comme la Hollande ont totalement industrialisé la production pour sortir des orchidées à des tarifs plancher. “On s’est demandé s’il fallait que l’on baisse nos prix. Mais, à l’analyse, on a conclu qu’on ne s’y retrouverait pas, même en vendant plus de plantes, car notre marge ne serait pas bonne. On préfère donc prendre le temps de faire de belles plantes.”
🌱 Quelques conseils pour conserver une orchidée
- Placer son orchidée à la lumière, par exemple juste derrière une fenêtre.
- Arroser abondamment ou tremper les racines quelques minutes, puis attendre que les racines soient sèches avant le prochain arrosage (les racines qui ont soif deviennent grises)
- Privilégier une eau pas trop calcaire comme l’eau de pluie ou de l’eau filtrée, à température ambiante
- Nourrir avec un peu d’engrais, tous les 15 jours par exemple.
- Éviter absolument le rempotage au terreau universel, privilégier les écorces de pin
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