Huit personnes sont jugées cette semaine à Bobigny, accusées d’avoir dirigé un réseau de proxénétisme de femmes transgenres dans une villa insalubre de Saint-Ouen.
L’enquête débute en juillet 2020 sur un renseignement transmis par une jeune prostituée transgenre récemment arrivée du Pérou, a rappelé lundi le président du tribunal correctionnel de Bobigny à l’ouverture du procès.
100 euros pour un bout dortoir mais 10 euros la passe
Pour pouvoir prétendre à une chambre en dortoir dans la maison close décatie, les organisateurs du réseau exigeaient 100 euros par semaine et 3 000 euros pour avoir l’autorisation de travailler au bois de Boulogne.
Vingt, parfois même dix euros la passe : le rapport des enquêteurs révèle l’extrême précarité des victimes, à qui certaines des prévenues avaient fait “miroiter des gains faramineux” pour les faire venir en France.
Des “tours prostitutionnels” en France
En plus des clients reçus à toute heure du jour et de la nuit dans cette maison close aux portes de Paris, la trentaine de prostituées logées à “la villa Biron” sillonnaient la France lors de “tours prostitutionnels” organisés par des locataires plus anciennes, dont deux comparaissent détenues.
Un couple de Péruviens, qui louait un appartement au rez-de-chaussée de la villa, figure également parmi les prévenus.
L’homme a reconnu vendre aux prostituées ses services de taxi entre Saint-Ouen et le bois de Boulogne.
Il louait également, à l’heure ou à la soirée, deux camionnettes pour que les prostituées y fassent des passes.
“Une des personnes auditionnées a indiqué aux enquêteurs qu’il y avait dans l’immeuble une forme de communauté”, rapporte le président du tribunal. Et “que vous étiez une bonne personne”, ajoute-t-il à l’adresse du chauffeur de taxi clandestin, qui assurait un transport fiable et sécurisé aux prostituées.
Mais la thèse de l’exploitation des victimes affleure quand l’homme est questionné sur le coût des menus services additionnels, comme l’achat de boissons pour ces femmes.
Trente euros pour un pack de bière : “C’est vous qui fixiez les prix, il n’y a pas de négociations et ça n’est pas volontaire de vous laisser un pourboire”, tique le juge Patrick Gerbault.
Pour la première fois confronté à son ancien locataire, J.M., 84 ans, avance à la barre par de petits pas hésitants.
“Je ne pouvais pas savoir qu’il était chauffeur de prostituées”, soupire le propriétaire de l’immeuble, poursuivi pour avoir mis son bien à la disposition de personnes se livrant à la prostitution et soumis ses locataires à des conditions d’hébergement indignes.
L’octogénaire, qui passait chaque mois à Saint-Ouen récupérer certains loyers en liquide, sera interrogé mercredi.
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