Dix-huit ans de réclusion criminelle ont été requis jeudi à l’encontre d’un tatoueur de 39 ans, jugé devant la cour criminelle départementale de Seine-Saint-Denis pour viols et agressions sexuelles sur neuf clientes de son salon.
Il y a chez l’accusé un “sentiment de toute-puissance absolue vis-à-vis de la justice, des femmes qui me préoccupe quant à une récidive”, a souligné l’avocate générale Margot Marques, lors de son réquisitoire.
La représentante du ministère public a également demandé une injonction de soins, une interdiction définitive d’exercer sa profession et une inscription au fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais) contre l’accusé.
Tatoueur à Neuilly-sur-Marn jusqu’à son incarcération en juin 2022, Dorian S., déjà condamné en 2018 pour une agression sexuelle sur une cliente mineure, est poursuivi pour des viols et agressions sexuelles entre 2019 et 2021 ainsi qu’un viol conjugal en 2012.
L’affaire avait commencé en juin 2021, quand une jeune femme avait déposé plainte accusant Dorian S. de lui avoir imposé une pénétration digitale et d’avoir frotté son sexe contre elle lors d’une séance nocturne de tatouage, un créneau que l’artiste réservait à “des gens spéciaux”.
“Toutes les parties civiles sont marquées par les faits qu’elles dénoncent, décrivent une sérialité évidente et criante dans ce dossier”, a poursuivi l’avocate générale.
Les points communs entre les neuf parties civiles, selon elle: “une fragilité dans leur histoire (…) Elles exercent des professions tournées vers le service à l’autre, (ont) un caractère introverti, une capacité d’empathie que monsieur sait instrumentaliser”.
“Shorts à trous”
Mercredi, l’accusé s’est défendu en assurant avoir voulu procurer de la “tendresse” à certaines clientes confrontées à des relations conjugales “toxiques”. Pour d’autres, il estime avoir mal interprété de premiers contacts physiques ayant débouché sur un rapport sexuel selon lui consenti.
“Elle m’a caressé le torse, m’a regardé avec des yeux de biche et elle m’a dit +c’est un mec comme toi qu’il me faudrait+”, a-t-il dit devant la cour à propos d’une victime.
Le salon de tatouage de Dorian S. se transforme alors, non pas en une “maison familiale”, comme l’a défini au début du procès sa mère, mais comme le “paradis de la chatte”, a qualifié Margot Marques, reprenant les propres mots de l’accusé pour qualifier son établissement, durant l’instruction.
Un lieu dans lequel le tatoueur a pu sexualiser ses séances, entre positions farfelues, – notamment à califourchon – port de “shorts à trous, à scratch qui ne scratchent plus, des pantalons dont la braguette se baisse toute seule“, a énuméré l’avocate générale. “Rien ne justifie qu’on projette sur son support, le corps d’une femme, ses désirs sexuels”, a-t-elle insisté.
A l’issue de plus de deux heures de plaidoiries, l’avocat de Dorian S., M. Charles Bruguière, a plaidé six acquittements et quatre relaxes – Dorian S. étant accusé de viol et d’agression sexuelle concernant l’une des victimes.
“18 ans, c’est une peine qu’on prononce pour les actes de torture et de barbarie, tentative d’assassinat (…) 18 ans, c’est mettre au ban de la société, c’est condamner un monstre. Dans cette salle, je ne vois pas un monstre, je vois un homme”, a-t-il fait valoir dans sa plaidoirie. L’une des parties civiles n’a pu retenir ses larmes et a quitté la salle.
“Etre accusé par quinze femmes dans la totalité de l’affaire, ce n’est pas rien (…) A-t-il seulement compris quelque chose aux deux semaines d’audience ?”, s’est interrogé l’un des avocats des parties civiles, Me Nurettin Meseci.
“Ce qu’il veut, c’est juste rajouter un visage sur son tableau de chasse, lui qui prend des photos de ses clientes sans leur consentement. Non, Monsieur, vous n’êtes pas stupide – durant son interrogatoire, Dorian S. l’aura répété “32 fois” selon l’avocate générale, qui dit avoir compté -, vous êtes un violeur”, a fustigé Me Lydia Toscani.
Dorian S. encourt 20 ans de réclusion criminelle. Le verdict est attendu vendredi.
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