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À Sucy-en-Brie, Reynhald Le Baron renouvelle l’art de l’ébénisterie avec inspiration

À Sucy-en-Brie, Reynhald Le Baron renouvelle l’art de l’ébénisterie avec inspiration © CD

Portraits en marqueterie, lampes géodésiques, boîtes en tout genre, meubles sur mesure… En ébène royal, amarante ou chêne, les créations de Reynhald Le Baron, ébéniste installé à Sucy-en-Brie depuis bientôt trois ans, réenchantent l’art de l’ébénisterie. Une passion née au détour d’une formation qui n’avait rien à voir. Parcours.

Rien ne prédestinait Reynhald Le Baron à devenir ébéniste. Lorsqu’il passe son bac, il choisit la comptabilité “par dépit”, puis enchaîne avec une année de design graphique à Montreuil, qui ne l’enthousiasme pas non plus. “Je me suis rendu compte que le travail devant un ordinateur n’était pas fait pour moi.” 

Le déclic survient pourtant durant cette année, lors d’un cours d’arts plastiques, quand un professeur propose à chacun d’expérimenter des matières inconnues. Reynhald Le Baron achète des ciseaux à bois, saisit une bûche dans la cheminée de son père, en Normandie, et se met à tailler. Une révélation.  “Je me suis dit qu’il fallait que j’en fasse mon métier.”

Première étape : la menuiserie

Il termine tout de même son année en design, puis cherche une formation en ébénisterie. Compliqué lorsque l’on a commencé par de la compta et du design graphique. Faute de place en ébénisterie, il commence par un CAP de menuiserie, en apprentissage chez un spécialiste du conditionnement de méthane liquide. “Ils avaient une menuiserie pour leurs expérimentations, c’était fantastique.” Après un an, il poursuit avec un brevet professionnel, toujours en menuiserie, toujours en apprentissage.  “J’ai eu de la chance”, se souvient Reynhald Le Baron, “car j’ai croisé un menuisier presque par hasard, je lui ai dit que je cherchais du travail, et il m’a proposé de passer à son atelier. Le lundi suivant, il me proposait un contrat, alors que dans la boîte précédente, j’avais été retenu après 600 candidatures !”

Dans cette entreprise d’agencement-menuiserie, il travaille pour des hôtels et des marques de luxe. Des années formatrices. “J’ai eu plusieurs maîtres d’apprentissage avec des cultures différentes, deux Portugais, un Italien…” Avec chacun leurs techniques. “Quant à mon formateur, il avait appris l’ébénisterie au Japon. C’est comme cela qu’aujourd’hui encore, j’utilise des outils japonais, dont l’usage modifie le geste lui-même. En France par exemple, on coupe en poussant, avec une main. Au Japon, on coupe en tirant avec deux mains”, illustre l’ébéniste.

L’ébénisterie en autodidacte

L’ébénisterie et ses placages raffinés, Reynhald Le Baron les apprend beaucoup en autodidacte, visionnant des tutoriels, lisant des vieux manuels ou rencontrant des ébénistes chevronnés.  “J’ai énormément appris par moi-même. Et je me suis rendu compte que j’avais acquis des savoirs que peu de gens de mon âge ont.”  Alors que son expérience lui permet enfin d’être pris dans une bonne formation en ébénisterie, La Bonne Graine à Paris, le Covid-19 vient tout bousculer. “J’ai profité du confinement pour repartir chez mon père, en Normandie, et me créer un petit atelier pour expérimenter plein de choses.” Au sortir du confinement, il a gagné en confiance. “Je ne voulais plus retourner à l’école. J’ai décidé que j’étais formé. Je suis retourné en région parisienne et me suis inscrit à Pôle Emploi.”

Rapidement, il est mis en contact avec une entreprise qui réalise des pièces sur mesure pour des artistes, musées, marques de luxe. Le jeune ébéniste y réalise des missions comme intérimaire puis en free-lance lorsqu’il décide de créer sa propre structure, à son nom.

Un atelier à soi

Depuis début 2023, il est à son compte, à la tête de RLB Ebénisterie. Son atelier, il le partage avec un menuisier dans les locaux d’une plus grosse structure, au sein d’un petit parc d’activités situé à Sucy-en-Brie, à deux pas du RER A. Une formule qui permet de s’acquitter d’un loyer modéré et de partager quelques outils. 

© CD

Désormais âgé de 31 ans, l’ébéniste développe à la fois ses propres créations et réalise du sur-mesure pour ses clients. Son fil conducteur : les boîtes. “J’adore fabriquer des boîtes. C’est le principal de mon métier. Je suis en revanche peu intéressé par la restauration, je préfère la création pure. J’aime aussi travailler à des formes complexes”, explique-t-il. C’est le cas de sa cave à whisky géodésique en wengé et cerisier. Voir ci-dessous.

© RLB Ebenisterie

Ou encore de sa mallette plaquée d’ébène royal dont les veines semblent avoir été dessinées à l’encre de chine. Voir ci-dessous.

© CD

Ebène royal, amarante, padouk… Au-delà des formes, la complexité du travail réside dans l’alliance des différentes essences de bois plaquées, issues de toutes origines. L’ébéniste travaille même les feuilles de pierre, du granit au marbre.

Des couleurs différentes qui permettent de composer de véritables tableaux en marqueterie.

Rebondir sur les rencontres

Pour trouver ses premiers clients, Reynhald Le Baron a su tisser son réseau, suscitant les échanges ou rebondissant dessus pour se mettre le pied à l’étrier. “Lorsque je suis arrivé à Sucy, j’ai été me balader dans la ville et repéré une vieille enseigne d’ébénisterie. Je suis entré pour m’annoncer. C’était un artisan qui faisait du métal. Il avait  juste gardé le panneau mais cela faisait trente ans qu’ il n y avait plus d’ébéniste à cette adresse. Nous avons sympathisé et il m’a présenté sa femme qui m’a fait découvrir et exposer à la boutique éphémère de la ville. Là, j’ai rencontré la maire qui m’a encouragé à faire le marché de Noël. Et sur le marché de Noël, j’ai fait la connaissance du Club d’entreprises de Sucy, (Agir et innover en Val-de-Marne) que j’ai rejoint. C’est comme cela que j’ai pu rejoindre les ambassadeurs du Fabriqué en Val-de-Marne!”, déroule l’entrepreneur.

Sur mesure

Autant d’étapes qui lui ont permis de rencontrer ses premiers clients. “Parfois, les gens repèrent une boîte qu’ils trouvent jolie, mais ils préfèrent le bois d’un autre objet. Alors je leur dis que je peux faire du sur-mesure.” Boîtes à cigares ou à bijoux, au nom du destinataire gravé à l’intérieur, mobilier chêne et pierre pour une pharmacie de Boissy-Saint-Léger, table d’architecte,  petit meuble en marqueterie, conversion d’un piano droit en jardinière… Les commandes peuvent être très spécifiques, comme cette étagère à Legos, en cours de conception pour un collectionneur de figurines. Conçue sur mesure, l’étagère compte une douzaine de rangées équipées d’une bande d’accroches à Lego. De quoi disposer plus de 150 personnages collectors !

Clin d’œil à une passion Lego qu’il partage, l’ébéniste a aussi conçu des figurines en bois, en taille XL.

© RLB Ebenisterie

Pour l’heure, un seul marché de Noël et deux participations à des boutiques éphémères, à Sucy-en-Brie et à Chennevières-sur-Marne, lui ont permis de prendre des commandes pour l’année. Sa prochaine exposition sera le Salon Savoir-faire et matières à La Ferme du buisson, à Noisiel, du 28 au 30 novembre.

Transmettre : une évidence

Désormais, c’est aussi à son tour de commencer à transmettre. “J’ai accueilli un premier stagiaire, le fils d’une cliente qui avait découvert mon travail sur Instagram et est venu faire son stage de seconde. Et je vais donner des cours dans une association en centre-ville, l’Atelier figuier cerise.” Pour l’ébéniste, cette transmission est essentielle pour le métier. “Aujourd’hui, l’artisanat a retrouvé ses lettres de noblesse, mais il y a eu une période de dénigrement dans les années 1980 à 2000”, estime-t-il. Une période durant laquelle la transmission ne s’est pas faite. “Mon premier maître d’apprentissage m’a confié que cela faisait vingt ans qu’il n’avait pas eu d’apprenti.”

Pour voir le travail de Reynhald Le Baron, voir son compte Instagram

(Actualisation 20h22)

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