Alors que la France a reconnu officiellement l’Etat palestinien ce lundi 22 septembre à l’Onu, quelques villes ont hissé leur drapeau au fronton de leur mairie, suite à l’appel lancé par le secrétaire du PS Olivier Faure et malgré l’interdiction du ministre de l’Intérieur démissionnaire Bruno Retailleau.
C’est le cas notamment à Ivry-sur-Seine qui mène déjà un bras de fer avec l’Etat concernant la banderole apposée devant la façade de l’hôtel de ville. Condamnée à le déposer par le tribunal administratif, au nom de la neutralité du service public, sous peine d’astreinte financière, la municipalité l’a retirée fin août avant d’en dresser une nouvelle au message identique mais formulé différemment, en faisant référence à l’ONU et au président de la République. (Lire notre reportage). La commune a par ailleurs fait appel du jugement au conseil d’Etat.
“Nous avons hissé le drapeau palestinien ce dimanche matin et le retirerons mardi matin. Je préfère donner de l’argent pour la reconstruction du centre culturel Al Bustan à Jérusalem Est, que nous avions soutenu dès sa création avec des maires progressistes d’Ile-de-France, et qui a été détruit il y a quelques mois, plutôt que de payer des amendes”, indique le maire d’Ivry, Philippe Bouyssou (PCF), rappelant que l’astreinte financière concernant la précédente banderole a coûté 7 000 euros à la ville. Depuis l’installation de la nouvelle banderole, la ville n’a pour l’heure reçu aucune injonction de la déposer.
L’interprétation de la neutralité du service public, le maire entend la faire trancher au plus haut niveau, en travaillant avec d’autres élus au dépôt d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). Car ce n’est pas la première fois qu’il y a friction sur le sujet. “Lors du décès de la reine d’Angleterre, on nous a demandé de mettre notre drapeau en berne, nous avons refusé”, rappelle Philippe Bouyssou. “Serait-il utile de rappeler à madame la Première ministre que la France ne fait pas partie du Commonwealth ?” avait interpellé l’édile dans un courrier à l’ancienne préfète. Même refus lors du décès du pape François. “Nous avons fait envoyer des bouquets de fleurs dans les églises mais le drapeau de la République n’a pas à être mis en berne pour un chef religieux.”
A Vitry-sur-Seine, une banderole installée devant l’hôtel de ville depuis le mois de juin, arbore déjà le drapeau palestinien depuis juin, réclamant la reconnaissance de l’Etat palestinien et demandant de mettre fin au génocide à Gaza. “Nous avons déjà été condamnés pour cela et le tribunal risque de nous condamner à une astreinte ce mercredi”, indique le maire, Pierre Bell-Lloch (PCF).

A Bonneuil-sur-Marne encore, la ville a fait hisser les deux drapeaux, palestinien et israélien, et le drapeau de la paix, fait savoir le maire, Denis Öztorun (PCF). Un rassemblement est prévu ce lundi à 18h30 devant la mairie pour demander l’arrêt des bombardements, la libération des otages, l’accès aux convois humanitaires et le respect du droit international.

Le maire a par ailleurs condamné un tag antisémite découvert ce samedi soir (mentionnant le nom d’Hitler avec un coeur devant) sur le mur d’une propriété du Haut Bonneuil. “J’étais sur place avec la Police nationale qui a aussitôt engagé une enquête pour déterminer les auteurs de cet acte lâche qui doivent être condamnés. D’ores et déjà, la ville a pris les dispositions nécessaires à garantir la sécurité de tous les citoyens. Une fois les preuves recueillies, nous nous sommes chargés, avec nos agents communaux d’astreinte, de nettoyer cette saleté immonde, et de rassurer la famille à qui j ‘ai apporté tout notre soutien. Aucun habitant de notre ville ne peut être inquiété ou insulté, par racisme, antisémitisme ou islamophobie”, a déclaré le maire dans un communiqué.
Aux portes de Paris, la mairie de Gentilly a également ajouté le drapeau palestinien à son fronton, ce 22 septembre.
A Arcueil aussi, le maire écologiste, Christian Métairie, a indiqué à 94 Citoyens qu’il prévoyait de hisser le drapeau palestinien. “Si je me réjouis de cette décision (la reconnaissance par la France), je ne peux que regretter qu’elle soit si tardive. Cela fait de nombreuses années que, pour ma part, je réclamais un tel engagement de la France et j’ai eu de nombreuses fois l’occasion de le rappeler, que ce soit dans un courrier adressé au président de la République ou par la signature d’appels publics. (…) Ce qui se passe depuis plusieurs mois dans cette enclave (Gaza) dépasse l’entendement et les massacres systématiques et génocidaires perpétrés par le gouvernement israélien relèvent de l’inimaginable et de l’intolérable”, a ensuite déclaré le maire d’Arcueil dans un communiqué, sans évoquer de drapeau.
Pas d’unanimité toutefois, ni au sein des villes communistes ni au sein des villes socialiste. Le maire du Kremlin-Bicêtre, “ne fera pas flotter le drapeau palestinien demain”, “il souhaite que la mairie demeure, comme elle l’a toujours été, un lieu de fraternité et de rassemblement, où chaque citoyen considère l’hôtel de Ville comme un bien commun. En qualité de maire, sa première responsabilité est de préserver la cohésion sociale au sein de la commune. Ainsi, quelle que soit sa position personnelle sur la situation internationale évoquée, il tient à apaiser les tensions et à rester fidèle aux valeurs qui font du Kremlin-Bicêtre une ville ouverte et accueillante pour toutes et tous”, a ainsi fait savoir Jean-François Delage (PS) dans un communiqué.
A Cachan, la ville ne hissera pas le drapeau mais a tenu à exprimer son soutien à la reconnaissance de l’Etat en illuminant la Maison Raspail ce 22 septembre. La maire, Helène de Comarmond (PS) indique également avoir proposé d’accueillir des familles réfugiées et aider financièrement les associations humanitaires.
Créteil : les Insoumis hissent le drapeau
A Créteil, ville socialiste où le dialogue interreligieux est régulièrement entretenu et où d’importantes communautés juives et musulmanes coexistent, des militants de la France Insoumise ont eux-mêmes hissé le drapeau aux côtés des autres, en fin de journée ce lundi, contre la position de la municipalité. “Au niveau local, en signe de solidarité avec le peuple palestinien, tant que le maire de Kyriat Yam n’aura pas condamné publiquement le génocide en cours, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre commis à Gaza, nous demandons la suspension immédiate du jumelage entre notre ville et Kyriat Yam. Ce geste symbolique a été fait par des villes comme Barcelone, Liège ou La Rochelle. Il faut faire entendre la voix de la paix à Créteil ! Dans le même temps, comme à Strasbourg, nous demandons la mise en place d’une étude pour organiser un jumelage avec une ville palestinienne. La coopération sera déterminante pour aider la Palestine à se reconstruire et permettre aux deux peuples de vivre en paix”, a déclaré à cette occasion le chef de file local du mouvement, Thomas Dessalles.

Si aucune ville socialiste du Val-de-Marne n’a suivi le mot d’ordre du premier secrétaire, d’autres l’ont fait en Seine-Saint-Denis, à l’instar de Saint-Denis-Pierrefitte. “Il ne s’agit pas d’un acte militant de longue durée”, mais un “choix” fait au moment où le président Emmanuel Macron doit officialiser la reconnaissance par la France de l’État de Palestine lors d’une Assemblée générale de l’ONU, a défendu Mathieu Hanotin, maire PS de Saint-Denis auprès de l’AFP.
A Montreuil, le drapeau palestinien était aussi de mise. Le maire, Patrice Bessac (PCF) a salué la reconnaissance par la France et enjoint l’Etat à “tirer les conséquences de cette reconnaissance : en termes de rétablissement des voies d’aide humanitaire, médicale et logistique au peuple palestinien et en termes de mesures diplomatiques et économiques pour mettre fin aux opérations militaires.” “Avec les associations de solidarité nationales et locales, notre commune est prête à soutenir cet effort pour sauver les enfants, les hommes et les femmes victimes de ces effroyables massacres en cours”, a également déclaré l’élu dans un communiqué.
Le drapeau a également été hissé dans d’autres communes de gauche d’Ile-de-France, à Saint-Ouen, Nanterre, Bagneux, Gennevilliers, Corbeil-Essonnes et encore Malakoff où la maire, Jacqueline Belhomme (PCF) a refusé de suivre l’injonction du tribunal administratif faisant suite au recours du préfet des Hauts-de-Seine.
Mise à jour 22 septembre (ajout déclarations et communiqués LFI Créteil, mairie Arcueil)

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