Après une accélération après la crise sanitaire 2020, grâce aux coronapistes, la construction du réseau de pistes cyclables en Ile-de-France subit un coup de frein à cause des pressions sur le budget des départements, qui financent en partie ces vastes projets.
Depuis février 2020, 241 km de pistes cyclables séparées par des bordures sont sorties de terre, selon l’organisme public Ile-de-France Mobilités, sous l’égide des différents niveaux de collectivités locales, des des villes à la région en passant par les départements et la Métropole du Grand paris, à chacun selon son échelle.
Dans ce maillage, les départements sont des rouages incontournables, en qualité de gestionnaires des routes départementales et de principaux financeurs des ouvrages complexes (carrefours, enjambement d’autoroutes et voies ferrées).
L’étau financier qui obère les finances des départements depuis plusieurs années freine toutefois cette dynamique. Selon l’association Départements de France, 54 conseils départementaux seront dans le rouge fin 2025, entre nouvelles dépenses imposées par l’État et baisse des recettes.
“Si Paris et les Hauts-de-Seine peuvent poursuivre la dynamique de déploiement des pistes, beaucoup d’autres départements sont en difficulté et risquent de lever le pied”, déplore Jacques Baudrier, maire-adjoint PCF de Paris et conseiller métropolitain au vélo, rappelant que 80% des pistes cyclables relèvent des départements.
Début décembre, le Val-d’Oise a repoussé à 2028 une passerelle cyclable située entre Saint-Ouen-l’Aumône et Pontoise, un chantier estimé de 8 à 10 millions d’euros.
“Le Département est pour le moment incapable d’engager ces investissements du fait des lourdes contraintes financières qui pèsent sur son budget”, explique auprès de l’AFP le conseil départemental, qui ajoute avoir “priorisé” d’autres chantiers.
Faute de passerelle, “les cyclistes vont devoir continuer à emprunter le pont de Pontoise, une trois-voies très dangereuse”, regrette Louis Belenfant, président du collectif d’usagers Vélo Ile-de-France.
Quant au département des Yvelines, ce dernier a repoussé à 2026 les études préalables à l’aménagement cyclable du pont de Maisons Laffitte, actuellement en réfection.
Autre facteur qui laisse attendre un ralentissement dans la construction de pistes cyclables en 2026: une période électorale peu propice au démarrage de travaux d’ampleur.
L’objectif régional reste de tripler les déplacements à vélo entre 2019 et 2030
Les arbitrages budgétaires des départements pourraient compromettre l’objectif régional de tripler les déplacements à vélo entre 2019 et 2030, à raison de 1,6 million de trajets quotidiens supplémentaires.
A ce jour, l’Ile-de-France compte 3 619 km de pistes cyclables séparées par des bordures, 1 544 km de voies vertes (partagées avec les piétons) et 1 118 km de bandes cyclables, selon Ile-de-France mobilités. Mais ces dernières sont éparpillées sur le territoire, sans continuité de tracé, et obligent les cyclistes à se réintégrer dans le trafic routier.
La région a donc mis en place un plan vélo, lancé fin 2019, pour pouvoir traverser de part en part l’Ile-de-France, via des pistes cyclables continues et sécurisées. Elle projette ainsi au total de bâtir 750 km “d’autoroute du vélo” sur 11 axes d’ici 2030. Un grand réseau baptisé RER Vélo puis VIF pour Vélo Ile-de-France.
En parallèle la Métropole du Grand-Paris s’est elle aussi saisie de la question et a initié en 2020 un réseau de 260 km de pistes cyclables sur 10 axes prioritaires, moyennant un budget global de 108 millions d’euros.
Lire : La méthode vélo de la Métropole du Grand Paris pour doper les pistes cyclables en banlieue
Une agence nationale du vélo ?
“Si le rythme ne faiblit pas, Paris pourrait s’approcher de Copenhague! Mais les départements de la grande-couronne se retrouvent avec une épée de Damoclès au-dessus de leur tête. Déjà sous-dotés en pistes cyclables et confrontés à une chute du budget, la place du vélo pourrait y reculer”, prévient Jacques Baudrier, qui plaide pour une baisse de la participation des collectivités (qui s’élève aujourd’hui à 20% du coût du projet) et la création d’une agence nationale du vélo.
Cette dernière serait chargée de “distribuer les financements” de manière à couvrir “l’ensemble du territoire d’équipements” pour relier villes et villages à travers tout le pays.
La vice-présidente régionale Marianne Duranton veut croire en une reprise de la dynamique début 2027: “même dans un contexte de finances contraintes, le vélo est devenu une priorité”, assure-t-elle.
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