Société | Ile-de-France | 13/10
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Les difficultés des préfectures d’Ile-de-France à renouveler à temps les titres de séjour plongent des habitants dans le désarroi

Les difficultés des préfectures d’Ile-de-France à renouveler à temps les titres de séjour plongent des habitants dans le désarroi © Charles Henry

En Ile-de-France, de nombreux étrangers doivent composer avec les retards de l’administration, incapable d’étudier leurs demandes de titres de séjour dans les temps. Contrat de travail suspendu, impossibilité de quitter le territoire ou perte d’allocations, les conséquences pour eux peuvent être lourdes.

Lorsque le compagnon d’Assa a perdu sa mère, il n’a pas pu se rendre en Côte d’Ivoire pour l’enterrement. La faute à une demande de titre de séjour en suspens depuis presque un an et demi.

L’avocate de la famille leur a en effet déconseillé de quitter le territoire, au risque de ne pouvoir y revenir, malgré la délivrance d’un récépissé attestant de la procédure en cours.

“On nous avait dit que ça prendrait quatre mois et on nous avait donné un récépissé de six mois”, raconte la jeune femme, Italienne, dont le compagnon, qui travaille dans le BTP, ne souhaite pas s’exprimer.

Depuis, quatre autres récépissés ont suivi, sans que le dossier n’ait été examiné à ce jour.

“C’est très compliqué à gérer, tous les jours on attend de recevoir le message”, s’insurge la jeune femme installée en Seine-Saint-Denis.

Comme sa famille, de nombreux étrangers, même en situation régulière, voient leurs vies pénalisées par l’engorgement de certaines préfectures, particulièrement celles d’Ile-de-France.

“On se retrouve avec des gens qui perdent leur travail, leur logement, leur couverture maladie”, dénonce Marie Barbarot, chargé de projet à la Cimade, association qui défend les droits de migrants et lance ce lundi une campagne pour dénoncer “la complexité et l’absurdité des procédures administratives”.

Dans le Val-de-Marne, fin septembre, une manifestation s’est aussi tenue à l’appel d’associations et syndicats dénonçant des “rendez-vous impossibles”, des “dossiers bloqués”.

Jean Bidimbou, Congolais de 65 ans, vit en France depuis 2007 et dépend de la préfecture de Seine-et-Marne. Début septembre, son contrat de travail à la SNCF a été suspendu car son titre a expiré fin août, malgré une demande de renouvellement déposée en mai.

Quant à Rekia Belal, Algérienne de 35 ans, elle est restée plus de deux mois sans titre de séjour avant d’obtenir fin juillet une attestation de prolongation, valable trois mois. Une situation qui l’a empêchée de percevoir des indemnités chômage et qui, dans le contexte des tensions diplomatiques franco-algériennes, l’a poussée à “rester à la maison” par “peur”.

A la préfecture de Seine-Saint-Denis, l’une des plus engorgées, le problème de ces ruptures de droit est considéré comme une “priorité” par le préfet Julien Charles.

Rappelant les “volumes hors normes” traités par ses services, avec près de 350 000 titres de séjour en circulation dans le département, le préfet pointe les conséquences d’un piratage informatique, lors d’un entretien à l’AFP.

Lire notre article : RDV titres de séjour en Seine-Saint-Denis : la préfecture coupe un module internet après un hacking massif

Pendant “une bonne partie de l’année 2024”, jusqu’à 60% des rendez-vous mis en ligne sur une semaine par la préfecture pouvaient ainsi être “aspirés” en quelques minutes pour ensuite être revendus autour de 200 euros.

Désormais, c’est la préfecture qui convoque les personnes, selon l’urgence de leur situation afin de “prioriser les rendez-vous”.

Pour le préfet, la mise en place de “procédures accélérées”, d’opérations “coups de poing” pour réduire le stock de titres prêts mais non délivrés et le rapprochement avec des interlocuteurs du monde économique et académique ont permis de sensiblement diminuer le nombre de rupture de droit, même s’il faut selon lui “rester humble”.

“Je ne considère pas qu’on soit au bout du chemin”, reconnait-il.

Saisines en forte hausse

L’Etat s’est fixé l’objectif d’un délai de 55 jours en 2025 pour instruire les demandes de renouvellement des titres de séjour et de 100 jours pour les premières demandes.

Mais “dans les faits, pour ce qui concerne les préfectures traitant le plus de demandes de titres de séjour, les délais sont encore très éloignés de ces objectifs”, a constaté, dans un document publié en mars, le Défenseur des droits, dont les saisines sur ce sujet ont explosé ces dernières années.

A titre d’exemple, en Essonne, les délais d’instruction pour un renouvellement étaient de 60 jours en 2021, 101 jours en 2022, 89 jours en 2023.

La préfecture du Val-d’Oise, elle, évoque sur son site internet un délai qui varie “en général (…) entre 60 et 90 jours” pour les renouvellements et “va au-delà” pour les premières demandes.

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