Reconnu par le ministère de l’Education nationale pour son taux de réussite au bac, le lycée Germaine Tillon au Bourget pourrait perdre une classe de 1ère et une classe de Terminale à la rentrée. De quoi susciter la colère et la déception chez les enseignants et les parents d’élèves.
“On ne comprend pas pourquoi vouloir casser un établissement qui marche“, souffle Lucie, professeure d’espagnol depuis une dizaine d’années au lycée Germaine Tillon. En cause, la fermeture annoncée de deux classes : une en 1ère et une terminale. “Nous demandons une audience au rectorat depuis deux mois et demi, sans aucun retour depuis. Nous avons annoncé une grève pour ce jour de rentrée des vacances“, explique son collègue Timothée, professeur de SES. Pour avoir des réponses enseignants et parents d’élèves sont reçus en fin d’après-midi à la direction des services départementaux de l’éducation nationale (DSDEN), cet fin d’après-midi.

“Cette restructuration va tout déséquilibrer“
“Nous avons sept classes de 2de, pour sept de 1ère et sept de Terminale. Cela veut dire que nous ne pourrons plus accompagner tous les élèves jusqu’au bac alors même que notre lycée a été reconnu depuis plusieurs années pour son accompagnement. Cette restructuration va tout déséquilibrer. Ce sont les classes de technologie et les nouveaux entrants qui seront fragilisés. Ça n’a pas de sens“, développe Timothée.
Au dernier classement des lycées, Germaine Tillon qui accueille 650 élèves en filières générales et technologiques, ainsi qu’un microlycée, affiche, de fait, 96% de réussite au bac. La mesure est d’autant plus incomprise qu’il n’y a pas de baisse notable des effectifs de 3ème dans les deux collèges de secteur, estime Timothée. Le rectorat prévoit, pourtant, parallèlement aux fermetures des deux classes, l’ouverture d’une 8ème classe de 2de. Ce qui pose la question de la continuité de la scolarité de tous les élèves. Pourront-ils poursuivre dans le même établissement ? Que deviendront les redoublants qui n’auront pas obtenu le bac ? posent parents et enseignants, relevant que le lycée de rattachement du secteur est celui d’Henri Wallon à Aubervilliers, plus éloigné.
De son côté, le rectorat indique que ses services “continuent le travail de préparation de la rentrée” et précisent qu’“un abondement de moyens pourra être opéré selon l’ajustement des effectifs.” Le rectorat ajoute que “la dotation [horaire général] allouée au lycée Germaine Tillion correspond aux repères académiques à critère équivalent.”
“On se dit qu’un établissement qui marche aussi bien, c’est trop beau pour le 93“
En septembre 2024, une grande partie des enseignants s’était déjà mobilisés, précise Lucie, syndiquée chez Sud Solidaire. “Ce qui est nouveau c’est que les parents organisent eux-mêmes leur marche vers la DSDEN“, souligne -t-elle.
De son coté, Faouffen, déléguée des parents d’élèves (PEEP) et maman de quatre enfants, dont un en terminale, un 2de et en 3ème au collège voisin, est surprise par “cette réforme“. “On devrait soutenir les professeurs et les personnels. J’ai été assistante d’éducation. Il y a, dans cet établissement, un investissement incroyable à tous les niveaux. On leur a dit qu’ils sont perfectionnistes, mais dans le 93, c’est de ça dont on a besoin. C’est triste, il faut que le rectorat repense son projet“, observe-t-elle, après avoir fait la marche, avec une vingtaine d’élèves, jusqu’à la DSDEN à Bobigny. Boris, qui est papa d’un élève de 2de, se dit “en colère et très déçu”. Car, poursuit-il, “c’est un établissement qui fonctionne super bien grâce aux enseignants et à la direction qui forment une communauté très soudée et qui ont monté un projet d’établissement très dynamique, avec des heures interdisciplinaires.”
Le vendredi une plage horaire d’une heure et demie est organisée, cite-t-il en exemple, durant laquelle son fils fait du théâtre. “Pour les élèves, on voit qu’ils sont suivis. Mais avec ce changement, je pense que les conditions pour les élèves comme pour les enseignants vont se dégrader“, commente Boris. Délégué de la FCPE, il a eu connaissance des fermetures de classes au conseil d’administration du lycée avant les vacances. “On nous a dit que les effectifs pourraient monter jusqu’à 35 voire 40 élèves. C’est dommage. On se dit qu’un établissement qui marche aussi bien, c’est trop beau pour le 93. Comme beaucoup de parents, je suis déçu et en colère“, assène ce père de trois enfants qui vit au Bourget depuis 2006.
“On obtient de bons résultats grâce à notre projet d’établissement, avec pourtant de faibles moyens. Nous sommes un établissement de secteur, en QPV [quartier politique de la ville], mais comme il est relativement récent [2014], nous ne sommes pas classés REP [reseau d’éducation prioritaire] ou REP+. Nous avons en moyenne 32 à 33 élèves effectifs par classe. On ne coûte donc rien à l’institution, mais on est bien au-dessus des effectifs par classe du département avec des indices de position social très bas. Donc les difficultés ne pourront que s’accentuer“, pointe Timothée.
Avant d’envisager de poursuivre la mobilisation, les deux enseignants gardent bon espoir de faire changer la donne. “L’idée n’est pas de faire une grève reconductible parce qu’on a toujours été dans le dialogue“, observe Timothée qui n’est pas syndiqué. “A un mois et demi du bac, on préfèrerait être devant nos élèves“, complète Lucie.
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