Elue à la tête de la Chambre de commerce et d’industrie du Val-de-Marne il y a près d’un an, Sally Bennacer a déjà imprimé sa marque tout en menant de front la gestion d’une entreprise de fabrication de stores et cloisons. Son truc : prioriser les problèmes, voir le verre à moitié plein, même quand le contexte économique n’est pas terrible, et travailler “beaucoup”. Interview à l’occasion du salon Effervescence 94.
Ce mercredi 14 octobre au Palais des sports Robert Oubron, pas moins de 180 entreprises du Val-de-Marne tenaient un stand pour échanger entre elles, puis avec les visiteurs, dans le cadre du salon Effervescence, pérennisant ainsi ce rendez-vous dont la première édition, en 2024, avait réuni 160 exposants. L’occasion de faire un petit point d’étape avec Sally Bennacer, élue à la tête de la CCI 94 il y a à peine un an, en succession de Gérard Delmas. Depuis son élection, la cheffe d’entreprise, qui a créé un atelier de fabrication de stores et cloisons, Art and Blind au Kremlin-Bicêtre, en 2000, puis développé une maque nationale, La Maison de la cloison, n’a pas chômé. Celle qui fut lauréate de la première édition nationale de Talents des cités en 2002 a notamment lancé un nouveau programme pour accompagner les entreprises des quartiers prioritaires, entre autres nouveautés. Comment concilier toute cette charge ? Quel regard sur l’économie locale ? Quelles priorités pour les entreprises ?
Vous êtes présidente de la CCI depuis bientôt un an, après en avoir été vice-présidente. Comment faire pour concilier la présidence de la CCI avec la gestion d’une entreprise ?
Je m’organise, je priorise, je prévois. Et j’ai des collaborateurs qui sont fiables, sur lesquels je peux m’appuyer.
Comment répartissez-vous votre temps entre votre mandat à la CCI et votre entreprise ?
De manière à peu près égale, mais un peu plus dans mon entreprise. Je vois mes collaborateurs tous les matins à 8 heures, avant qu’ils ne partent sur les chantiers. Je travaille aussi pour mon entreprise le soir. Et le samedi toute la journée, je me consacre aux clients.
Quelle surcharge de travail ce mandat représente-t-il, en pourcentage de temps ?
Environ 40%. Je travaille environ 70 heures par semaine, voire au-delà. C’est beaucoup, mais la réussite passe par le travail, il n’y a pas de secret. Je ne travaille pas le dimanche en revanche, c’est réservé à la famille !
En termes de développement de votre entreprise, ce mandat ne risque-t-il pas de vous ralentir ?
Non car je développe autrement. J’ai créé la Maison de la Cloison, qui est le leader en France de la cloison mobile pour l’habitat aujourd’hui. Je distribue ainsi des cloisons que je ne pose pas. J’ai des revendeurs dans toute la France, qui vendent et qui installent. Nous, on a juste à fabriquer.
Est-ce que cette charge de travail vous a fait hésiter ?
Tous les risques que j’ai pris, j’ai d’abord failli les refuser à chaque fois. Quand j’ai démissionné pour créer mon entreprise, la veille, j’avais peur. Le jour où j’ai démoli pour construire, c’était un risque que j’ai soupesé. Cela a été pareil avec la CCI. La veille, j’ai encore hésité. Car désormais il n’y a plus de pare-feu. On prend tout de front. Et puis je me suis dit : si je n’essaie pas, je ne saurai pas.
Après, j’ai eu un accueil extraordinaire de la part du monde économique du département. Cela m’a motivée, m’a portée, m’a donné envie d’aller de l’avant. Toutes les institutions ont été au rendez-vous et les collaborateurs de la CCI se sont aussi énormément investis. Cela a été un travail d’équipe à l’intérieur et à l’extérieur de la CCI. Encore aujourd’hui, les trois présidents des intercommunalités et le préfet étaient au rendez-vous lors de la remise des trophées, pour venir appuyer le monde économique du territoire.

Comment vont les entreprises du Val-de-Marne ?
Comme ailleurs, elles doivent concilier l’augmentation des coûts de production (matières premières, salaires, électricité, assurances, loyers…) et la baisse du chiffre d’affaires car les gens consomment moins, uniquement par nécessité. Cela réduit les marges. Mais je préfère voir le verre à moitié plein. Il y a en Val-de-Marne beaucoup de structures, d’entrepreneurs, de clubs d’entreprises dynamiques qui s’investissent. La CCI est pour sa part la maison des entreprises, le référent pour les aider à se créer, à croître, à se pérenniser, à recruter ou encore à se transmettre.
“l’humain, l’humain, l’humain”
Concrètement, nous poursuivons nos accompagnements avec des nouveaux programmes autour de l’intelligence artificielle et de la cybersécurité, de l’appréhension des marchés publics, mais aussi de l’accompagnement des entreprises issues de quartiers politique de la ville (QPV), sujet qui me tient à cœur car ce sont des viviers de talents. Il suffit juste de les aider à mettre le pied sur la première marche. C’est-ce que nous faisons.
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Concernant le recrutement, nous avons un très bon partenariat avec France Travail, collaborons avec l’Académie de Créteil et avons des conseils dédiés. Car les ressources humaines sont un enjeu stratégique pour les entreprises. Quand on parle des conditions pour qu’un commerce réussisse, on dit l’emplacement, l’emplacement, l’emplacement. Concernant l’entreprise, c’est l’humain, l’humain, l’humain!
“Un entrepreneur qui sort est un entrepreneur qui s’en sort”
Quid des entreprises en difficulté ?
Nous essayons de voir comment mettre tous les acteurs ensemble pour aider, avec chacun sa solution, chacun son idée, chacun son problème. On ne pourra pas sauver tout le monde, mais on peut essayer d’aider tant qu’il est temps. J’ai réuni quelques banques pour étudier les solutions qu’on pouvait apporter et elles sont prêtes à travailler pour mieux prévenir et conseiller en amont par exemple. Le tribunal de commerce peut aussi conseiller, notamment sur la prévention qui est anonyme. L’une des clefs est de ne pas laisser l’entrepreneur seul face à ses problèmes, car un entrepreneur qui sort est un entrepreneur qui s’en sort.
“la priorité pour les entreprises doit être la cybersécurité”
Concernant le numérique, l’intelligence artificielle est-elle devenu l’enjeu prioritaire pour les entreprises ?
Honnêtement, aujourd’hui, pour moi, la priorité pour les entreprises doit être la cybersécurité car personne n’est à l’abri. Savoir utiliser l’IA, c’est important. Mais bien protéger ses données, c’est encore plus important. Sur ce sujet, nous proposons des formations, des webinaires gratuits, et avons référencé des entreprises. Il faut savoir se prémunir dans le monde numérique, de la même manière qu’on ne laisse pas traîner son sac à main ouvert.
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