Après le retrait des délégations de trois élus Écologistes, le maire (PS) de Saint-Ouen a acté la rupture avec ses anciens alliés et recompose sa majorité.
C’est l’épilogue d’un “divorce” entamé le 16 décembre dernier, lors du vote du budget primitif 2025. Les trois élus du groupe des Écologistes, Sabrina Decanton, Driss Naïch, respectivement 1er et 4ème adjoints, et Dina Deffairi-Saissac s’étaient alors abstenus. Le conseil municipal a voté le 10 février, à bulletin secret, le retrait de leurs fonctions avec 27 voix pour et 7 contre.
“Est-ce que la méthode est brutale ? Oui. Sommes-nous surpris ? Moyennement“
Ce scrutin est, en fait, la conséquence logique du retrait des délégations des trois conseillers municipaux annoncé dans un communiqué diffusé le 3 février, dans un premier temps par la ville, puis très rapidement supprimé, avant de reapparaître sur le compte Facebook de Adel Ziane, président du groupe majoritaire et sénateur (PS). La majorité du maire (PS), Karim Bouamrane, y tire les conséquences du non-vote du budget par les écologistes. “Trois élu·es écologistes ont décidé de ne pas voter pour le budget primitif 2025, se mettant subséquemment dans l’opposition de la majorité socialiste écologiste et citoyenne à laquelle ils appartenaient.”
Lundi soir, Sabrina Decanton n’avait toujours pas digéré la sanction. “Avant nous appris le retrait de nos délégations et notre exclusion de la majorité par Facebook ? Oui. Est-ce que la méthode brutale ? Oui. Sommes-nous surpris ? Moyennement“. Selon elle, les trois élus n’ont pas eu l’opportunité de s’expliquer.
“Le désaccord politique n’a pas donné lieu à des discussions”
Une accusation réfutée par Karim Bouamrane : “Vous pensez que je me suis réveillé un matin et que je me suis dit de façon autocratique : retrait de délégation et vote contre leur statut de maire-adjoint. Il y a eu un vote du groupe Réinventons Saint-Ouen qui, à la majorité s’est exprimé pour le retrait de délégation, pour que les trois élus ne siègent plus au sein de la majorité et pour le non-maintien de leur statut“. Pour l’édile, “le désaccord politique n’a pas donné lieu à des discussions avant le conseil municipal, et c’est ça qui a été regrettable. J’ai appris le lundi du conseil municipal qu’il allait y avoir abstention“.
“Un budget est une frontière politique“
Au-delà de la forme, c’est bien sur le fond que la rupture est réellement consommée. “Nous regrettons le choix de cette forme de purge plutôt que celui du dialogue et de la coconstruction. Car, depuis longtemps, nous déplorions de ne pas avoir la possibilité d’exercer pleinement nos fonctions (…). D’être considéré comme des partenaires et d’être pleinement associé aux décisions majeures“, estime Sabrina Decanton. Une distanciation qui, a-t-elle expliqué, a conduit à la création d’un groupe écologiste dans la majorité, au lendemain des élections européennes en juin 2024.
Concrètement, Sabrina Decanton énumère certains désaccords qui avaient été, selon elle, exprimés en interne : “le cas du Grand Hôpital, mais également des éléments programmatiques que nous n’avons pas tenus. Comme celui de la régie publique de l’eau qui pourtant était dans notre programme. Le manque de pistes cyclables sécurisées. La création d’une foncière de commerce. Et j’en passe“. Elle égratigne au passage la méthode du maire de Saint-Ouen : “les trop nombreuses annonces et la communication perpétuelle ont un coût. Politique tout d’abord, car elle suscite espoir, puis la déception. Un coût ensuite financier : c’est d’ailleurs une des choses que nous avions pu dire sur le dernier budget et qui avait justifié en partie notre abstention“, a-t-elle lâché.
Surtout, pour l’élue écologiste, “une abstention n’est pas un vote contre“. D’un point de vue pratique, a-t-elle allégué, le programme commun de la majorité municipale, la charte Réinventons Saint-Ouen, ne stipule pas qu’une abstention sur le budget, a pour effet la suppression de délégations, comme l’affirme la majorité municipale.
“Voter ou non un budget est une frontière politique qui s’applique dans tous les conseils municipaux de France“, lui a rétorqué Karim Bouamrane, citant Jean-Luc Mélenchon, tout en précisant que “c’est une des seules fois de ma carrière politique où j’aurais un point de convergence avec [lui].” Et, “oui, dans la charte, quand il y a désaccord politique, il y a retrait de délégation“, a-t-il asséné, promettant la publication cette charte.
Le PCF et Générations.s entrent dans la majorité audonienne
Alors que les Écologistes siègent désormais dans l’opposition, la majorité municipale de Karim Bouamrane a en revanche intégré les trois élus du groupe À gauche : Émilie Lecroq et Benoît Belloni du PCF et Jamila M’Barki de Génération.s. Pour rappel, les Écologistes s’étaient ralliés au premier tour des élections municipales de 2020 à la liste de Karim Bouamrane, arrivée en première position au 2d tour à l’issue d’une triangulaire l’opposant à la liste PCF/Générations.s et celle de l’ancien maire (DVD) William Delannoy. Sébastien Zonghero, qui été conseiller municipal délégué à l’aménagement, a quant à lui été élu adjoint au maire.
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