Votée lors du conseil municipal du 19 décembre, la municipalisation du cinéma Jacques Tati qui, fêtera ses 40 ans en 2026, intervient en plein conflit sur l’avenir du lieu, entre une partie des salariés et la mairie de Tremblay-en-France. Dans une lettre adressée aux adhérents et aux usagers, le maire (DVG), François Asensi, s’inquiète d’une situation financière “particulièrement grave“.
“Le cinéma Jacques Tati, propriété de la Ville depuis 1983 et véritable joyau culturel de notre commune, restera un lieu public grâce à sa municipalisation. Elle reflète notre volonté de garantir l’accès à un cinéma de proximité, de qualité et financièrement abordable pour tous les Tremblaysiens“. L’annonce fin décembre, par communiqué, a provoqué la colère du syndicat Sud Solidaire Culture. “Aujourd’hui donc, via la page Facebook de la ville de Tremblay-en-France (!), les salariés apprennent la confirmation d’une municipalisation du cinéma Jacques Tati, que leur employeur n’aura même pas daigné officialiser auprès d’eux. Le fond et la forme étant à l’avenant, nous aurons l’occasion de revenir sur la teneur de ce texte qui dit bien la considération portée à ses lecteurs, censés gober ce flan les yeux fermés“, réagit-il à cette décision qui placera le cinéma géré depuis 1983 par l’Association tremblaysienne pour le cinéma (ATC), sous l’autorité directe de la mairie.
“Cette démarche du conseil municipal met fin à une situation de blocage par certains salariés“
À l’origine de cette reprise en main, “l’alerte lancée par la commissaire aux comptes de l’association qui gère le cinéma au regard de la situation financière inquiétante du cinéma“, explique la ville. Cette association a demandé à la municipalité d’assumer son statut de propriétaire“, défend-elle. “À la suite d’un large débat, Pierre Laporte [LFI], Lino Ferreira [EELV] et Sébastien De Carvalho [groupe Tremblay à venir] ont voté contre la municipalisation alors qu’Amel Jaouani et Amadou Cissé [groupe de la majorité municipale] se sont abstenus“, précise la municipalité, sans occulter le conflit social que traverse l’association. “Cette démarche du conseil municipal met fin à une situation de blocage par certains salariés qui rejettent l’autorité de la présidente du conseil d’administration de l’association et du directeur du cinéma.”,
“Il est impératif de trouver des solutions durables pour assurer la pérennité du cinéma Tati“
Quelques semaines auparavant, François Asensi, le maire (DVG) de Tremblay-en-France, avait déjà fait état des problèmes. “Un déficit structurel menace l’avenir de cet équipement public et son rôle central dans la vie culturelle de notre commune“, écrit-il, le 15 octobre, aux adhérents et aux usagers. “Le manque de diversifications des recettes, additionné à une baisse nette des entrées, réduisent considérablement les marges de manœuvres et font reposer un déficit – qui se creuse d’année en année – uniquement sur la municipalité“, souligne l’édile. Il précise au passage que l’ATC a bénéficié de 105 millions d’euros d’investissement de la ville en subventions et en travaux de modernisation ces 40 dernières années. S’il se dit conscient de la “crise profonde que traverse le secteur cinématographique“, il fait aussi savoir qu'”il est impératif de trouver des solutions durables pour assurer la pérennité du cinéma Tati“. François Asensi se défend aussi de toute remise en cause du modèle de gestion associatif, mais condamne “les tensions au sein des équipes“. “Je n’accepte pas que des bénévoles hésitent à venir au cinéma de peur d’être pris à partie, alors que cela fait plus de 30 ans qu’ils fréquentent ce lieu“, fait-il savoir. De son côté, le groupe d’opposition Tremblay à venir, s’interroge dans une tribune parue dans le magazine municipal de décembre : “Quel est le véritable but caché derrière cette lettre ? Se justifier de futurs licenciements économiques proposés par la présidente pour redresser la situation du cinéma ?” Et de s’étonner de la situation économique du cinéma alors qu’il “se portait plutôt bien” lors de l’assemblée générale de l’association tenue en juin dernier, au cours de laquelle le bilan des comptes “exposé par la commissaire aux comptes, a d’ailleurs été voté à l’unanimité.”
“Volonté obstinée de ne pas remplacer les employés absents“
De fait, la section tremblaysienne du syndicat Sud Solidaires culture s’oppose depuis plusieurs mois à la direction de l’association. “Nous sommes affligés par le contenu diffamatoire des lettres qui ont été adressées aux adhérents et qui feraient de nous des séparatistes dangereux et menaçants envers des adhérents. Nous pouvons être en désaccord sans falsifier la vérité“, répond le syndicat au maire de Tremblay-en-France. Dans un post récent sur son compte Facebook, la section pointe aussi “l’opacité des prises de décisions [qui] n’a jamais permis de travailler dans la confiance, et l’analyse des faits et des dires tend à confirmer qu’il y a bien anguille sous roche.” Dans le fond une partie des salariés remettent en cause “le nouveau fonctionnement imposé par la volonté obstinée de ne pas remplacer les employés absents (temporairement ou définitivement), ainsi que l’ambiance délétère que provoquent ces conditions de travail, fragilisent la santé physique et psychologique des salariés qui, les uns après les autres, finissent par craquer.” Et de dénoncer un “plan social“.
120 000 entrées par an
Avec ses trois salles, dont une proposant des séances en 3D, le cinéma de Tremblay-en-France réalise 120 000 entrées annuelles, ce qui en fait, peut-on lire sur le site internet de la ville, “le second cinéma associatif Art-et-Essai de Seine-Saint-Denis en termes de fréquentation de ses publics.”
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