Justice | Val-de-Marne | 30/01
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Tribunal de commerce en Val-de-Marne : le précieux tribut des magistrats bénévoles à la justice

Tribunal de commerce en Val-de-Marne : le précieux tribut des magistrats bénévoles à la justice © CD

“Je voulais contribuer à rendre la justice. Cela me nourrit !” Experte en sécurité ferroviaire, Laurence Thorigny fait partie des dix juges intronisés au Tribunal de commerce de Créteil lors de sa rentrée solennelle ce lundi 27 janvier. Comme elle, une cinquantaine de bénévoles donnent chaque semaine de leur temps pour juger des contentieux liés aux entreprises, statuer sur les faillites, prévenir les sociétés en difficulté économique.

À 51 ans, Laurence Thorigny (photo de une) a une vie bien remplie. À la tête de sa société d’expertise en aptitudes sécuritaires ferroviaires à Joinville-le-Pont, Locorail, mais, aussi, d’une association interprofessionnelle, elle est également mère et grand-mère. Un agenda serré dans lequel elle arrive, depuis plusieurs années, à caser deux jours par semaine au service du Tribunal de commerce, d’abord à Bobigny, puis à Marseille et désormais à Créteil. “Au départ, j’avais envie de contribuer à une justice plus juste, car j’avais vécu à titre personnel des expériences négatives et des tentatives de me nuire qui m’ont beaucoup touchée”, confie-t-elle. Depuis, cette passion ne l’a plus quittée. Bien sûr, c’est un “sacrifice” reconnait-elle, mais rendre la justice, “cela me nourrit !” Le temps passé ? Environ deux jours par semaine : un pour siéger, l’autre pour préparer et rédiger le compte rendu. “Je me suis aussi sentie plus forte dans mon rôle de gérante. J’ai acquis des outils précieux pour être un bon chef d’orchestre sans ma société.”

Comme tous les juges consulaires, Laurence Thorigny a dû suivre une formation préalable à l’École nationale de la magistrature (ENM). Ce cursus, composé de huit modules d’une journée, permet de transmettre les fondamentaux aux futurs juges, et doit être complété, en cours de mandat, par de la formation permanente. À Créteil, les nouveaux juges sont aussi parrainés par les anciens.

Les nouveaux juges du Tribunal de commerce de Créteil (ils tournent le dos sur le photo, faisant face aux juges déjà en place), officiellement intronisés par le Parquet, à l’occasion de l’audience solennelle de rentrée, ce lundi 27 janvier.

Au total, le Tribunal de commerce de Créteil compte 51 sièges de juges, dont 49 sont actuellement pourvus. “13 sont partis et 10 sont arrivés”, chiffre le président, Philippe Jombart.

Cette année 2024 a été marquée par la disparition du vice-président, Christian Fosse, à qui il fut rendu hommage lors de l’audience. D’autres juges ont été atteints par la limite d’âge de 75 ans, ou encore le nombre de mandats (cinq maximum). Parfois, de nouveaux juges réalisent aussi qu’ils n’ont pas suffisamment anticipé la charge de travail ou les attendus. Endosser le rôle de juge implique notamment de maîtriser le syllogisme juridique, cette méthode de raisonnement en trois étapes (la règle de droit, l’application de cette règle à l’affaire jugée et la conclusion). Il faut “analyser les faits, bloc par bloc, développer les argumentaires de fait et de droit, les enchaîner, prendre du recul”, résume le président du tribunal. C’est tout l’enjeu de la formation ENM et du parrainage que de transmettre cette méthode.

Parmi les nouvelles juges, Valérie Couraudon, 43 ans, ex-restauratrice à Boissy-Saint-Léger, s’est totalement prise au jeu de cette science humaine. L’ancienne présidente du club d’entreprises de Boissy, qui a fait un crédit-vendeur pour transmettre son restaurant, a découvert le tribunal à cette occasion, car elle avait besoin de clefs et d’aide dans sa procédure. “Et je suis tombée dedans”, témoigne-t-elle. “Je passe 5h à 8h à étudier en amont des formations à l’ENM, pour pouvoir poser les bonnes questions”, indique-t-elle.

Valérie Couraudon fait partie des 10 nouveaux juges du Tribunal de Commerce de Créteil

Cette rentrée 2025, la parité hommes-femmes a été atteinte pour la première fois parmi les dix nouveaux juges. Une nouvelle promotion également un peu plus jeune. Alors que le nombre d’entreprises continue de croitre dans le département, poussée par la création de très petites structures, et que les procédures collectives sont en augmentation, les juges du Tribunal de Commerce ne chômeront pas en 2025. “L’année prochaine, je vais demander deux sièges supplémentaires”, indique Philippe Jombart.

En 2024, ils ont rendu 22 567 décisions, en hausse de 46% par rapport à 2023. Autant d’affaires conduites par ces juges bénévoles. Pour l’heure, toutefois, le Tribunal de Commerce se partage le traitement des procédures amiables et collectives des entreprises avec le tribunal judiciaire. Seuls les commerçants et les artisans relèvent, en effet, de la compétence du tribunal de commerce. Une situation qui pourrait changer. Un appel à expérimentations a ainsi été lancé pour créer des tribunaux des activités économiques (TAE) qui prennent en charge les procédures amiables et collectives de toutes les sociétés, quel que soit leur statut, sauf les professions réglementées.

“Nous n’avons malheureusement pas été retenus”, regrette Philippe Jombart. Pour l’heure, 12 TAE ont été désignés pour une période test de quatre ans, dont Paris et Versailles uniquement, pour l’Ile-de-France. Si l’expérience est concluante, ce périmètre élargi sera généralisé à l’ensemble des juridictions. De quoi contribuer à alléger un petit peu plus la charge des tribunaux judiciaires.

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