Nous sommes en 1973, tous les grands ensembles n’ont pas encore peuplé Créteil quand Gilles, personnage principal du nouveau roman d’Agnès Riva, découvre la ville nouvelle par son lac artificiel, subjugué par la toute nouvelle préfecture aux “vitres teintées couleur caramel”.
Un roman d’initiation dans un monde en construction, telle est la trame de ce troisième ouvrage de l’autrice, qui réside à Thiais, en Val-de-Marne, et aime ancrer ses histoires dans la géographie urbaine des villes nouvelles. Un autre ailleurs, revient sur la création de ce Nouveau Créteil, insufflé par l’ancien maire, le général Pierre Billotte, à la fin des années 1960, qui inspire le personnage de “l’Amiral” dans le roman. Embauché pour animer cette ville nouvelle, Gilles, fasciné par ces “immeubles aux formes géométriques, entourés d’équipements collectifs et de mobilier urbain assortis” est chargé de donner vie à cette nouvelle cité qui rassemble des habitants venus plus ou moins par envie.
“Est-ce que le métro va finir par arriver un jour jusqu’ici ? (…) Il faudrait ouvrir de nouvelles places en crèche, parce que celles de la Croix-des-Mèches sont insuffisantes. (…) On aurait besoin d’un marché, comme celui qui se tient dans l’ancien Créteil, ça mettrait un peu d’animation…” Les réclamations commencent dans les réunions publiques organisées par le gentil animateur.
Tout en racontant la société des années 1970, mêlant l’intime et la grande histoire, Agnès Riva ne perd pas le fil de son exploration urbaine, invitant à la déambulation dans la ville préfecture, “du centre hospitalier universitaire Henri-Mondor, un hall ultramoderne, tout en longueur, sous un plafond en bois sombre doté d’abat-jour métalliques, qui n’était pas sans rappeler l’aérogare d’Orly”, à la nouvelle mairie “au milieu d’une immense dalle traversée de lignes ondulées”, à proximité du “vaste chantier de la Maison des arts et de la culture André-Malraux, que l’Amiral destinait à devenir l’âme de la ville, l’antidote à la cité-dortoir, le lieu où chacun pourrait s’abriter ou communier, tout en développant son sens critique et sa sensibilité.”
Après “Ville Nouvelle“, Agnès Riva poursuit sa réflexion : quand est-ce que la ville commence ? Comment se crée une communauté ? “Le Nouveau Créteil allait-il se structurer, de part et d’autre de la nouvelle autoroute, en deux rives, une « rive gauche » autour de l’université, et une « rive droite » avec ses immeubles de standing et ses boutiques, relais du grand commerce parisien ? Ce quartier aurait-il un jour une âme ?”
Rencontre-dédicace à Créteil
L’autrice sera en dédicace à la Librairie du Village, dans le vieux Créteil (38 rue du général Leclerc) ce samedi 19 avril à partir de 17 heures.
Agnès Riva “Un autre ailleurs” Chez Gallimard, 2025. 18€50
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