Justice | Paris | 06/06/2023
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Violences policières de la Brav-M à Paris : plaintes classées sans suite et renvoi en conseil de discipline

Violences policières de la Brav-M à Paris : plaintes classées sans suite et renvoi en conseil de discipline © WCC_Domenjod

Mis en cause pour avoir insulté et humilié des jeunes manifestants dans la nuit du 20 au 21 mars, des policiers de la Brav-M (Brigade de répression des actions violentes motorisée) ont été blanchis par la justice. De son côté, la préfecture de police a simplement donné un avertissement à quatre d’entre eux et en a renvoyé trois en conseil de discipline.

Dans la nuit du 20 au 21 mars, des membres de la Brav-M Mike 4, en patrouille dans le 3ème arrondissement, avaient interpellé sept jeunes manifestants, soupçonnés d’avoir pris part à des dégradations dans un cortège sauvage dans le centre de Paris. L’un des interpellés avait alors discrètement enregistré les échanges avec les policiers, où l’on entendait ces derniers proférer des menaces et des propos humiliants.

“La prochaine fois qu’on vient, tu monteras pas dans le car pour aller au commissariat, tu vas monter dans un autre truc qu’on appelle ambulance pour aller à l’hôpital”, peut-on notamment entendre dans l’enregistrement.

Deux bruits de gifles sont également audibles, avant que l’un des policiers lance: “Tu commences à bégayer ! T’en re-veux peut-être une, que je te remette la mâchoire droite ?”

“J’espère que demain t’es déferré, tu vas prendre quoi six mois? Six mois c’est bien et une OQTF (obligation de quitter le territoire)”, dit un autre policier à un jeune étudiant tchadien.

Alors qu’un de leurs responsables les informe qu’ils doivent se déplacer dans un autre quartier de Paris, l’un des policiers conclut : “tu as de la chance, on va se venger sur d’autres personnes.”

L’étudiant tchadien de 23 ans, installé en France depuis quatre ans, et dont l’un des policiers avait fait allusion à sa migration en lui demandant s’il s’était “accroché à l’aile de l’avion”, et une autre manifestante, avaient porté plainte le 24 mars contre les effectifs de la Brav-M. Leurs plaintes visant le préfet de police et la procureure de Paris, la procédure judiciaire avait alors été dépaysée au parquet de Bobigny.

La justice blanchit les agents

Finalement, les plaintes de deux manifestants pour arrestation arbitraire et violence contre des policiers de la Brav-M, ont été classées sans suite par le parquet de Bobigny, selon des documents consultés lundi par l’AFP. Mardi 30 mai, un avis de signé par Eric Mathais, le procureur de Bobigny, indique, en effet, qu’“il ressort de l’ensemble des éléments que les fonctionnaires de police ont procédé à cette interpellation dans les formes légales“. Une conclusion qui a surpris l’avocat des jeunes manifestants. “Je suis étonné que seul le procureur de la République de Bobigny n’ait pas entendu les enregistrements et les faits avérés dont faisait état cette plainte“, regrette Maître Arié Alimi.

Sanctions disciplinaires en cours

Sur le plan disciplinaire, trois agents devront encore rendre des comptes. Suivant l’avis de l’Inspection générale de la police nationale (IGPN), la préfecture de police de Paris a renvoyé trois policiers en conseil de discipline et infligé à quatre autres un avertissement, a-t-elle indiqué lundi à l’AFP.

Grosse fatigue

Avant d’être entendus par la “police des polices”, les policiers mis en cause avaient rédigé des rapports à leur hiérarchie, consultés par l’AFP, dans lesquels ils livrent leur version des faits, motivant leur dérapage par une grande fatigue. Selon le gardien de la paix Yann C., l’unité a commencé son service à 10H30. Il est 23H00 passé quand ils sont enregistrés. “La fatigue physique et morale était à son seuil le plus élevé, nous contraignant à agir bien au-delà de nos capacités”, écrit le brigadier Benoît A.

Le gradé décrit “des vacations de 14 heures, voire 16 heures” durant lesquelles “nos besoins fondamentaux et vitaux n’ont pas été respectés, s’hydrater et se restaurer était très compliqué”, écrit-il. “Certains d’entre nous, moi inclus, ont dû prendre des médicaments afin de bloquer leur transit intestinal car il était impossible d’accéder et d’avoir le temps de se rendre aux toilettes“, ajoute-t-il. “A bout”, “de plus en plus fatigué et irritable”, “à fleur de peau”, le policier Pierre L. reconnaît qu’il n’a pas agi “avec le professionnalisme habituel”.

C’est lui qu’on entend lancer à l’un des interpellés: “C’est le premier qui bande qui encule l’autre?”. Le fonctionnaire n’y voit “aucune connotation sexuelle” mais “un combat de coqs verbal”. Il ne voulait pas “laisser l’individu se sentir supérieur et gagner cette joute”.

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