Savali Aydar aime Joinville, la ville où il se sent bien dans sa deuxième vie, lui qui a dû quitter la Turquie à 13 ans. Le cœur des couleurs rassemble des tirages du photographe, montrant sa passion pour Joinville et pour l’image saturé, qu’il voit comme un lien entre réalité et imaginaire.
Saisir l’instant, c’est être au bon moment au bon endroit. Fixer l’image, cette envie l’a pris très tôt, dans le village où il a grandi, dans le Kurdistan, une région orientale de la Turquie. « Dans mon village, on avait une télé, j’étais fasciné, je me demandais comment ça marchait. Je voyais les couleurs. Je voyais les images défiler mais j’avais envie de les figer. »
Son père, qui a quitté la Turquie pour chercher meilleure fortune, en Suisse, en Italie puis en France, rentre parfois en Turquie. « Un jour il est venu avec un polaroid. J’adorais les instantanés ». En Turquie, avec sa mère et ses deux frères, la vie n’est pas facile. Ils quittent le Kurdistan pour rejoindre Bursa, non loin d’Istanbul.
Savali va à l’école mais multiplie les petits boulots pour faire bouillir la marmite. Usine automobile, récolte de fruits entre autres.
L’été de ses treize ans, la famille part pour la France rejoindre le chef de famille, dans un contexte politique compliqué depuis le coup d’Etat militaire au début des années 1980.
« Je n’ai pas choisi, j’ai subi le choix de mes parents. Quand tu quittes ton pays comme ça, tu es déraciné. » La famille s’installe à Paris. Savali suit une formation de stylisme et, à 18 ans à peine, trouve un travail dans le milieu du textile.
Sa passion pour l’image et la photo l’amène à travailler avec des réalisateurs kurdes. Il ne cesse pas la photo en amateur. « Avec la photo numérique je suis rentré dans le pixel. Ça m’a permis d’aller plus loin sur les couleurs pour interpréter la réalité. »
Son arrivée à Joinville est un tournant. « J’ai vécu dans différents endroits et contexte mais je me suis senti apaisé à Joinville »
Dès lors, il saisit, boitier en mains, des moments, où la nature est souvent présente, scrutant parfois des détails dans le quotidien urbain, au gré des rencontres, de la vie.
Son goût de la saturation suscite une perception picturale de ses tirages. « J’aime modifier l’image, ça modifie la perception qu’on a du naturel. J’aime amplifier le réel, c’est comme ça que je vois l’image et je veux la montrer ainsi à tout le monde. »
Pendant le confinement, il est suivi sur les réseaux sociaux par des internautes qui l’encouragent à exposer. Le projet se concrétise avec un accrochage à l’Hôtel de Ville, à la fin du mois de juin pour découvrir le cœur d’un artiste français aux racines orientales, un cœur qui bat pour les couleurs.
L’organisateur est :