Alors que plus de 300 000 postes restent non pourvus dans la restauration, l’école Cuisine mode d’emploi (s), concoctée par le chef Thierry Marx pour faciliter l’accès à l’emploi, ne désemplit pas et a déjà formé 4 000 stagiaires. L’école vient de fêter ses dix ans dans son centre de la cité des Boullereaux à Champigny-sur-Marne… dans l’ancien collège du chef étoilé.
Ambiance de fête ce lundi soir dans l’ancien réfectoire du collège Lucie Aubrac de Champigny-sur-Marne, qui accueille l’une des antennes de Cuisines mode d’Emploi(S) depuis quatre ans. Devant le buffet réalisé sous la houlette du chef Frederic Michaud, les camarades de promotion se retrouvent. C’est que, depuis la première école lancée dans le 20ème arrondissement parisien en 2012, l’initiative a fait des petits. Pour Thierry Marx, passé par l’échec scolaire et une orientation en mécanique générale alors qu’il rêvait déjà de cuisine, donner leur chance à des personnes qui n’ont pas trouvé leur voie professionnelle tombait sous le sens, et c’est avec Frédérique Calandra, maire PS du 20ème arrondissement, que le projet a ainsi démarré. Le principe : une formation rapide de 11 semaines pour obtenir un diplôme reconnu par l’Etat, équivalent à un CAP cuisine. Pas de prérequis pour être intégré mais une condition pour rester : ne jamais manquer à l’appel.
Dix ans plus tard, ce-sont pas moins de 4 000 stagiaires qui ont été formés dans les différents centres, et ont pris leur envol. Fatou Camara, habitante de Fontenay-sous-Bois, s’est reconvertie pendant la crise sanitaire. “J’ai commencé par travailler dans le secteur associatif mais la cuisine a toujours été présente dans ma vie. Pendant la crise sanitaire, j’ai participé à des ateliers de cuisine et des distributions solidaires et cela m’a donné envie de me former aux gestes et techniques pour me professionnaliser”. Depuis, cette mère de cinq enfants s’est spécialisée dans le métier de traiteur.
Major de sa promo, Toan Van Che partait de zéro lorsqu’il a intégré l’école en 2018, il dirige désormais la cuisine d’une agence d’architecture parisienne. “Je réalise des documentaires et traversais une période de chômage. J’ai été invité à visiter cette école et dès que j’ai vu la cuisine, j’ai eu comme un déclic. J’ai beaucoup travaillé au cours de ces deux mois pour tout apprendre de la gastronomie française. C’était intense mais j’en garde un excellent souvenir”, confie-t-il.
Maimouna Kanté, lui, a fait du mannequinat avant de se former. “J’ai souhaité faire cette formation parce que je souhaitais fusionner la cuisine au thé et proposer des accords. J’ai créé ma marque de thé et d’infusions d’Afrique qui s’appelle Kanthé”, explique-t-il, désormais à la tête de son entreprise.
Nombre d’anciens stagiaires étaient loin de se douter qu’ils gagneraient leur vie dans les cuisines des restaurants, à l’instar de Lucas Pasquet, diplômé il y a trois ans, qui avait souhaité se réorienter après un parcours en génie mécanique. “Suite à un stage en restaurant gastronomique, j’ai voulu me spécialiser en gastronomie française et j’ai commencé à travailler au Plaza Athénée.”
4 000 stagiaires formés en France, dont 200 à Champigny
A Champigny-sur-Marne, l’école a déjà formé 200 stagiaires en quatre ans. “Nous accueillons avec empathie ces personnes aux parcours parfois compliqués et leur inculquons rigueur et professionnalisme”, insiste Alexandra Giraud, directrice de l’école campinoise qui rappelle que c’est ici, dans les cantines de l’ancien collège, que déjeunait Thierry Marx quand il était ado. Aujourd’hui, le département a reconstruit un autre collège et mis l’équipement à disposition d’initiatives locales.
Plus de 300 000 emplois non pourvus dans la restauration
Au total, ce-sont près de 4000 stagiaires qui ont été formés depuis 10 ans, à Paris, Champigny-sur-Marne, Clichy-sous-Bois, Grigny, Besançon, Nice, Dijon, Toulouse, Marcq-en-Baroeul, Toulouse. Cuisine mode d’emploi (S) dispose aussi de formations itinérantes à Limoges, Vichy et encore La Bresse, et compte bien poursuivre son développement. “Selon les chiffres de la profession, il manque aujourd’hui entre 300 000 et 350 000 emplois non pourvus dans la restauration. Il faut combler ce déficit en formant davantage”, explique Véronique Carrion, directrice générale de l’association. D’autres écoles devraient prochainement ouvrir à Meaux et Saint-Quentin en Yvelines. Des restaurants de professionnalisation ont aussi été ouverts à Boulogne et sur le campus des métiers de Nice et un troisième projet est en cours à Gagny.
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