Le Conseil départemental du Val-de-Marne doit débattre ce lundi d’un plan de déploiement de 520 nouvelles places pour les personnes handicapées, avec un fort accent sur l’accompagnement des personnes souffrant de troubles du spectre autistique (TSA).
Contexte national : des plans de rattrapage mais un manque cruel de places
L’accueil et l’accompagnement approprié des personnes en situation de handicap reste en France un lourd défi, avec plusieurs dizaines de milliers de personnes en attente de solution. Ces dernières années, plusieurs plans se sont succédé pour développer l’offre d’accueil à tous les âges mais le défi reste crucial, d’autant que la population des personnes concernées progresse. Aujourd’hui, la prévalence des personnes sévèrement handicapées est de 1% à la naissance, dont la moitié d’origine périnatale. Les progrès médicaux ont limité le nombre de décès à la naissance, en particulier d’enfants prématurés, mais n’ont pas encore permis d’en supprimer systématiquement les séquelles. Par ailleurs, l’espérance de vie des personnes handicapées mentales (notamment atteintes de trisomie 21) a fortement augmenté. Un progrès bien-sûr, mais qui doit être accompagné. Des place en SESSAD ou IME pour les enfants aux places médicalisées ou non pour les adultes en passant par les Esat (Etablissement et services d’aide par le travail), les listes d’attente perdurent à chaque étape. Un amendement (amendement Creton) permet aux IME de garder au-delà de 20 ans des jeunes adultes qui ne trouvaient pas d’établissement adapté à leur âge mais cela ne résout pas le manque global de places. Pour palier cette insuffisance et mieux individualiser les réponses, le gouvernement a initié depuis trois ans le programme “Réponse accompagnée pour tous” suite au rapport 2014 de Denis Piveteau (“Zéro sans solution“) qui préconisait de passer d’une logique de places, pas toujours disponibles, à une logique de réponse plurielle associant plusieurs prises en charge médico-sociales, sanitaires et éducatives, en lien avec tous les acteurs concernés par le handicap au sein d’un territoire. Cette approche, généralisée dans tous les départements depuis janvier 2018, n’a toutefois du sens que si elle peut s’appuyer en parallèle sur le développement de places nouvelles dans les différents types d’établissements.
Compétences partagées département – état : le financeur dépend du type de prise en charge
Pour bien comprendre l’ensemble des tenants et aboutissants de ce sujet, il convient également d’expliquer que les compétences en matière de handicap sont partagées entre les conseils départementaux (CD) et l’Etat (représenté localement par l’ARS, l’Agence régionale de santé) selon les modalités suivantes: l’ARS est compétente pour les enfants, l’ARS et le CD sont compétents à 50/50 pour les adultes en foyer médicalisé et le CD est compétent à 100% pour les foyers non médicalisés. A noter que, concernant les enfants, si l’Etat est bien compétent et finance à 100% les structures, c’est le CD qui paie la Prestation de compensation du handicap (PCH) pour payer l’accompagnement à domicile lorsque les places ne sont pas disponibles en structure.
Objectif: 520 nouvelles places en Val-de-Marne d’ici à 2020
Dans le Val-de-Marne, 4 634 places sont actuellement prévues pour les adultes et 2410 pour les enfants. 2000 adultes et 500 enfants du département bénéficient toutefois d’une orientation en établissement qui n’a pu être mise en place sur le territoire. C’est dans ce contexte que le département doit débattre d’un plan de développement pour accélérer le nombre de nouvelles places dans le cadre de son 4ème schéma handicap. Au programme : 520 nouvelles places d’ici à 2020 – dont 140 dépendront de l’accord de l’ARS, compétent pour les enfants et l’accueil médicalisé (voir paragraphe précédent). “Nous ouvrons déjà quasiment une nouvelle structure chaque année, notait ce vendredi Brigitte Jeanvoine, vice-présidente du Conseil départemental en charge de l’autonomie, en marge de l’inauguration de l’extension de l’IME T’Kitoi de l’Institut Le Val-Mandé dont elle est présidente. Parmi les derniers établissements ouverts, la Maison Partagée Simon de Cyrène à Rungis, visitée par le Premier ministre au printemps 2017, dont le concept de compromis entre foyer et résidence banale a été initié par Philippe Pozzo di Porgo, tétraplégique, qui a inspiré le film Intouchables.
225 places et une plate-forme pour autistes lancées dès 2018
Concrètement, trois opérations pourraient être lancées dès 2018, concernant 225 places dont une plateforme pour jeunes et adultes autistes à partir de 16 ans. Cette plate-forme comprendrait 65 places en établissement (Foyer Accueil Médicalisé) et 50 places dans des services de soutien à domicile grâce à des unités d’intervention spécialisées dans les situations d’autisme complexe et le soutien des familles. Il est aussi prévu de lancer un foyer d’accueil médicalisé de 60 places pour les adultes souffrant d’autisme et handicap psychique, ainsi qu’un foyer de vie de 50 places pour adultes souffrant d’un handicap mental et psychique. Objectif: une ouverture en 2019 pour les services à domicile et en 2021 pour les foyers.
155 places, lancées à partir de 2019
Trois nouveaux appels à projet devraient suivre en 2019, pour une ouverture en 2022. Au programme : deux établissements de chacun 55 places, spécialisés en autisme et handicap psychique avec internat, accueil temporaire et accueil de jour ; un foyer de vie non médicalisé de 25 places pour des personnes souffrant de handicap psychique et mental ; 25 places d’accueil de jour dans les structures existantes et encore 20 places dédiées aux malvoyants et malentendants, sous la forme d’un Samsah (Service d’accompagnement médico-social pour adulte handicapé).
100 places dédiées aux enfants et 40 places dédiées aux adultes lourdement handicapés, qui dépendent de l’accord de l’ARS
Si les 380 places adulte dépendent soit à 100 % du département pour les foyers non médicalisés, soit à 50% du département et 50% de l’ARS pour les foyers médicalisés, les 100 places dédiées aux enfants (qui consisteraient en deux nouveaux IME) et les 40 places dédiées aux adultes lourdement handicapés (qui sont prévues en MAS, Maison d’accueil spécialisé), dépendent pour leur part à 100% de l’autorisation et du financement de l’ARS. Lors de l’inauguration de l’extension de l’IME T’Kitoi de Saint-Mandé vendredi dernier, Brigitte Jeanvoine n’a donc pas manqué de faire un discret appel du pied à l’ARS dans son discours, évoquant l’engagement du département en matière d’accompagnement du handicap et rappelant la sollicitation auprès de l’ARS pour accompagner ce projet. Ce à quoi l’ARS a répondu, par la voix de son directeur de l’autonomie, Marc Bourquin. “Nous avons été saisis par le Conseil départemental du Val-de-Marne sur plusieurs initiatives il y a quelques mois. Dans les semaines qui viennent, nous y apporterons des réponses significatives dans le cadre du PRS (Projet régional de santé) en cours d’achèvement pour une promulgation en juin 2018″, s’est engagé le représentant de l’ARS. Une réponse significative. A quoi cela correspond-il ? Au terme des discours d’inauguration, l’intéressé a laissé entendre, en aparté, que la programmation pour les jeunes qui était proposée, échelonnée sur plusieurs années, était “envisageable”.
Le plan sera débattu ce lundi 5 février lors de la séance plénière du Conseil départemental.
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